Une Montréalaise de 95 ans, survivante de l'Holocauste et des camps de concentration, dépouillée de 225 000 $ par son neveu chargé d'administrer ses finances, devra être remboursée à la suite d'un jugement du Tribunal des droits de la personne.

Charles Finkelstein devait s'occuper de sa tante et était son mandataire, puisque la vieille dame souffre de démence et de plusieurs problèmes de santé qui la rendent vulnérable.

Mais le neveu « a abusé de sa confiance et de son état de dépendance à son égard. Il a ainsi profité de sa position de force pour détourner d'importantes sommes d'argent, et ce, à l'encontre des intérêts de sa tante », indique la juge Doris Thibault, dans sa décision rendue le 7 mars dernier.

Iona Davidovitz, née en Roumanie en 1924, a vécu l'Holocauste et les camps de concentration. Elle a perdu tous ses biens durant la guerre.

Quand la paix est revenue, elle s'est mariée et s'est établie en Israël, où elle a fait des études d'infirmière. Elle est arrivée au Canada en 1955, où elle a travaillé comme aide-infirmière auprès des personnes âgées.

Comme elle n'a jamais eu d'enfants, ses neveux, notamment Charles Finkelstein, sont sa plus proche famille.

Entre 2010 et 2011, ce dernier a profité de la vulnérabilité de sa tante pour retirer des sommes importantes de ses comptes bancaires, auxquels il avait accès, indique le jugement.

Voiture de luxe

Alors qu'il accompagnait sa tante en Floride, au condo qu'elle y possédait, il a notamment acheté, avec l'argent de Mme Davidovitz, une voiture de marque Mercedes en expliquant que c'était pour transporter la dame âgée.

Une amie de Mme Davidovitz avait d'ailleurs porté plainte contre le neveu auprès des autorités de Miami, et M. Finkelstein s'est vu retirer son titre de mandataire par la suite.

Charles Finkelstein a plaidé que sa tante lui avait fait des dons parce qu'il l'aidait depuis plusieurs années et acceptait de l'accompagner en Floride, alors qu'elle n'aurait pu y aller seule.

Mais l'argent n'était pas transféré dans le compte du neveu par sa tante. C'est lui-même qui faisait des retraits dans les comptes de sa tante, a révélé l'enquête de la Commission des droits de la personne.

De plus, l'état de Mme Davidovitz ne lui permettait pas de donner son consentement éclairé pour faire un don de cette importante. C'est d'ailleurs parce qu'elle est vulnérable qu'il détenait une procuration pour s'occuper de ses affaires financières, ce qui la rendait dépendante envers lui, note la juge Thibault.

Elle souligne que la Cour d'appel a déjà confirmé que l'acceptation de dons de la part d'une personne vulnérable peut constituer de l'exploitation, « si l'exploiteur connaît l'existence de la vulnérabilité de la personne et sa dépendance de lui, et qu'il désire mettre cette position à son profit en manipulant en quelque sorte sa victime ».

En plus de devoir rembourser sa tante, Charles Finkelstein a été condamné à lui verser 10 000 $ en dommages moraux et punitifs.

« Chacune des situations d'exploitation qui est portée à notre attention est à la fois unique et empreinte de tristesse, voire de détresse », a commenté Philippe-André Tessier, président de la Commission, au sujet de cette décision. « Avec ce nouveau jugement, le Tribunal réaffirme que la population est protégée contre cette forme d'abus qu'est l'exploitation financière. En cas de doute concernant une possible situation d'exploitation, les gens ne doivent pas hésiter à s'informer ou à porter plainte. »