(Saint-Jérôme) Ugo Fredette a été poussé dans ses derniers retranchements vendredi dans un contre-interrogatoire très serré à son procès pour les meurtres au premier degré de Véronique Barbe et Yvon Lacasse. La Couronne a particulièrement remis en question son « black-out » lors de la mort de sa conjointe et son « absurde » bagarre à l’intérieur du véhicule du septuagénaire.

L’homme de 43 ans a martelé sa version des faits au jury : une Véronique Barbe « hystérique » l’a poussé dans l’escalier, puis a tenté de le poignarder, le 14 septembre 2017. Il a bloqué le coup, mais les « fils se sont touchés » dans sa tête. Il se souvient ensuite uniquement d’un « flash » sur le balcon, puis du corps de sa conjointe, un couteau dans la poitrine.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Me Steve Baribeau, procureur de la Couronne.

Quelques jours après sa cavale, Ugo Fredette a pourtant donné une version plus détaillée des évènements à ses parents dans un appel présenté au jury. Il a alors raconté que Véronique Barbe avait pris un couteau sur la table extérieure pour le menacer.

« J’ai voulu l’en empêcher. Ça s’est reviré contre elle. Après ça, la lame s’est comme coupée. On est rentrés en dedans, c’est là que ça s’est engagé pour de vrai… Ça n’a pas été long », avait alors confié Ugo Fredette.

Cuisiné par la Couronne, Ugo Fredette a peiné à expliquer les disparités entre les deux versions. « J’étais mélangé, je venais de sortir d’un coma de quatre jours. C’était une déduction », s’est-il défendu.

« Je vous suggère que votre amnésie est volontaire et que vous vous souvenez très bien d’avoir poignardé Mme Barbe », a lancé le procureur de la Couronne Me Steve Baribeau. « Non », a murmuré Ugo Fredette, en hochant de la tête à la négative.

Avant de prendre la fuite avec un enfant de six ans, Ugo Fredette reconnaît avoir pris le temps de barrer les portes de la maison, de mettre un « locker de sécurité » sur la porte-patio et de fermer les rideaux. « Il n’y a rien de logique. Je paniquais, je suis parti », a-t-il expliqué. Véronique Barbe a été poignardée à 17 reprises.

Fredette a tenté d’attirer la victime, plaide la Couronne

Environ une heure plus tard, Ugo Fredette s’est arrêté à une halte routière de Lachute pour faire « ses besoins ». Or, il n’a pas utilisé les toilettes publiques du parc. Il est allé dans un boisé pour faire son « numéro deux », parce qu’il voulait garder la vue sur son véhicule, où il avait laissé l’enfant, a-t-il martelé.

Yvon Lacasse, 71 ans, a profité de son absence pour tenter de s’emparer de l’enfant, selon l’accusé. Quand Ugo Fredette est intervenu, le septuagénaire lui a grafigné le visage et a brisé ses lunettes. Les deux hommes se sont ensuite battus à l’extérieur, puis à l’intérieur du véhicule. En raison de la « force de la bataille », ils sont tous deux ressortis par l’autre portière. Ugo Fredette a alors porté le coup fatal à M. Lacasse avec une prise de judo.

« Comment deux personnes peuvent se battre dans un char ? », s’est questionné Me Baribeau. « C’est absurde, mais c’est exactement ce qui s’est passé », a lâché l’accusé. Une spécialiste en projection de sang a témoigné dans le procès n’avoir trouvé aucune preuve qu’Yvon Lacasse avait été frappé à l’intérieur du véhicule.

Me Baribeau a aussi reproché à Ugo Fredette d’avoir retiré les bouchons de ses pneus pour attirer Yvon Lacasse dans le but de lui voler son véhicule. « M. Fredette, vous saviez que [M. Lacasse] était là. Et c’est vous, M. Fredette, qui avez enlevé ces bouchons ! », a clamé le procureur. « Jamais en 100 ans ! Jamais ! J’ai pas fait ça », s’est défendu fermement l’accusé.

La défense d’Ugo Fredette se poursuit lundi au palais de justice de Saint-Jérôme.