(Saint-Jérôme) Un jeune garçon a raconté mardi au jury les derniers instants de Véronique Barbe au procès pour double meurtre d’Ugo Fredette au palais de justice de Saint-Jérôme. « Mon cœur battait vraiment vite, je voulais pas voir qu’elle mourait », a confié l’enfant de neuf ans à une policière quelques heures après le meurtre, il y a deux ans, à Saint-Eustache.

Selon la théorie de la Couronne, Ugo Fredette a tué Véronique Barbe, le 14 septembre 2017, en la poignardant à une dizaine de reprises sur le patio arrière. Il a ensuite utilisé un second couteau pour poignarder à nouveau sa conjointe à l’intérieur de la maison. La poursuite entend prouver qu’Ugo Fredette était incapable d’accepter leur séparation.

PHOTO DÉPOSÉE EN PREUVE À LA COUR

Le balcon arrière de la résidence d’Ugo Fredette et Véronique Barbe. C’est là que Fredette aurait poignardé une première fois la victime, selon la Couronne.

La poursuite a présenté mardi matin la vidéo de l’interrogatoire d’un garçon maintenant âgé de 11 ans, possiblement témoin du meurtre de Véronique Barbe. Un témoignage difficile à visionner. Un moment, le garçon dessine une tête de mort au tableau, alors qu’il est laissé seul dans la salle d’interrogatoire. Il efface son dessin avant le retour de la policière.

Le garçon jouait « à la guerre » au sous-sol avec un autre garçon, plus jeune, ce soir-là. Soudain, il entend Véronique Barbe crier. Il monte à l’étage. « Elle était étendue dans le salon et elle m’a dit d’appeler la police, mais je n’ai pas appelé », explique-t-il, calmement.

Il a ensuite vu Véronique Barbe partir en criant « à l’aide ». Puis, Ugo Fredette lui dit de s’en aller. « Ugo l’avait pris quand elle était dehors, elle disait : ouch, je crois. Il l’avait entré, après elle était par terre, elle respirait fort », raconte-t-il, en imitant de quelle façon Ugo Fredette tenait sa conjointe, les deux mains sur son ventre.

« Je me suis demandé ce qui se passait, je suis resté un petit peu, jusqu’à tant qu’elle reste par terre et respire très fort. Je me suis demandé si elle allait mourir », confie le garçon à la policière.

Le garçon prend la fuite, mais revient rapidement dans la maison. « Je suis retourné, parce que je capotais trop. J’étais tout seul avec Véronique qui est couchée par terre dans la maison », dit-il.

Le témoin a également mentionné avoir vu un autre garçon, près du corps de Véronique Barbe, pendant la scène de chaos. « Il disait un truc… T’es capable, faut pas que tu meures », se souvient-il.

Une « poche de patates »

Le second témoin de la Couronne mardi a relaté avoir aperçu un homme transporter un enfant comme une « poche de patates » sur le boulevard Antoine-Séguin à Saint-Eustache. « L’enfant ne se débat pas », a raconté Normand Dufresne. Il n’y avait rien d’anormal, selon lui.

Le témoin a continué son chemin dans l’autre direction en voyant le camion F-250 de l’homme avec l’enfant prendre la route dans son rétroviseur, puis tourner à gauche sur le boulevard Binette. Il ne connaissait pas les résidants de cette maison, mais il passait tous les jours devant celle-ci.

Quelques heures plus tard, après une partie de hockey, plusieurs téléphones sonnent dans le vestiaire. Normand Dufresne apprend qu’une alerte AMBER a été déclenchée. Sa conjointe l’informe au téléphone que l’enlèvement s’est produit dans leur quartier. Normand Dufresne lui dit alors avoir justement vu un homme sortir avec un enfant dans leur quartier. Il se rend au poste de police pour faire une déposition.

Le prochain témoin mardi après-midi parlera de l’alerte AMBER, a annoncé le procureur de la Couronne Me Steve Baribeau mardi midi.

Un « cri de mort »

Lundi, le premier témoin du procès a raconté avoir entendu le « cri de mort » d’une femme chez ses voisins, le 14 septembre 2017. Elle a ensuite vu Ugo Fredette tirer sa conjointe amorphe dans la maison, les bras sous ses aisselles. Véronique Barbe était alors « molle » comme une « poupée de chiffon ».  

Christine Gouin a demandé à son mari, à l’intérieur de sa résidence, d’appeler le 911. Deux jours plus tôt, elle avait d’ailleurs promis à Véronique Barbe de contacter les policiers en cas de chicane conjugale. « Dis au 911 que ça brasse rare l’autre côté ! Tu dis : violence conjugale ! », lance-t-elle à son mari.

« Je me suis repositionnée pour regarder. J’ai vu Ugo qui tenait Véronique par en dessous des bras, il la tirait vers la porte-patio et il tirait fort. Et Véronique ne bougeait plus, elle était comme une poupée, la tête penchée par avant, elle avait l’air toute molle. J’étais tellement en panique, j’aurais voulu crier… Mais c’était comme si le nom d’Ugo et Véronique ne venait plus à ma bouche », a témoigné lundi Mme Gouin.

Ugo Fredette est également accusé du meurtre au premier degré d’Yvon Lacasse. Selon la poursuite, il a tué l’homme de 71 ans pour lui voler son véhicule à une halte routière pendant sa cavale. Ça faisait alors une heure qu’il s’était enfui avec un enfant, après avoir tué Véronique Barbe. Le corps de M. Lacasse a été découvert dans un boisé de Harrington. Ugo Fredette a finalement été arrêté le lendemain, en Ontario, au terme d’une poursuite policière, a indiqué vendredi Me Steve Baribeau dans son exposé introductif.