Elle s’est fait arracher des mèches de cheveux, elle a été étranglée dans son lit avec un fil d’ordinateur, elle a été forcée de se prostituer dans l’Ouest. La victime alléguée de Denis Désiré, responsable de la sécurité d’une école secondaire de Montréal-Nord pendant 10 ans, a bien cru mourir le jour de l’arrestation de son bourreau, l’an dernier.

« J’ai failli mourir. Il m’a étranglée avec un fil de laptop. I almost died. J’ai failli mourir à cause d’une auto brisée. J’ai brisé l’auto de Denis. Il a débarqué avec des gars et ils m’ont battue », a témoigné la victime hier au procès pour proxénétisme de Denis Désiré, 45 ans, au palais de justice de Montréal. « Il paraît bien gentil, mais c’est une façade, tout le monde connaît D-Nice, mais pas Denis Désiré. »

Sur des vidéos de surveillance diffusées hier au procès, on voit la victime courir dans les corridors de son immeuble résidentiel du secteur de Pointe-aux-Trembles, le matin du 24 mars 2018. On voit ensuite Denis Désiré la prendre par le cou et la rentrer de force dans l’ascenseur. La jeune femme se met ensuite à genoux dans l’ascenseur, visiblement apeurée.

« Denis était fou, mais pas aussi fou que ce jour-là », lance la victime, qui a témoigné hier par vidéoconférence. Peu de temps après cette scène de violence dans l’ascenseur, les policiers interviennent sur les lieux, à la suite d’un second appel au 9-1-1 de Denis Désiré pour se plaindre du comportement violent de la femme. Ébranlée, la victime tient une mèche de cheveux dans ses mains, constate un policier. « J’ai plus de cheveux à l’avant, il les a arrachés… je voyais la racine… », témoigne-t-elle.

La jeune femme de 23 ans a raconté hier qu’elle devait donner tous ses gains de la prostitution à Denis Désiré, alors que lui « faisait la belle vie ». Si elle ne payait pas, « ça finissait mal, très mal, tellement mal… », lâche-t-elle. Elle habitait dans un appartement sans électroménagers et n’avait pas un sou sur elle. « Même mes strings, mes faux cils, Denis achetait ça. J’avais pas d’argent », explique-t-elle.

« El Presidente D-Nice »

À la demande de Denis Désiré, elle faisait des séjours à Calgary, à Winnipeg et à Toronto pour se prostituer, a-t-elle témoigné. « Avec Denis, faut travailler. Sinon il y a des conséquences physiques, des affaires pas l’fun », raconte-t-elle. Pourtant, au début de leur relation, à 18 ans, elle était couverte de cadeaux par Denis Désiré, dont le surnom est « El Presidente D-Nice ».

La victime a fait savoir à plusieurs reprises pendant son témoignage sa résistance à témoigner au procès. « Si je finis à six pieds sous terre par les amis de Denis Désiré, je ne suis pas plus avancée », a-t-elle lancé d’emblée. Son identité est d’ailleurs protégée par une ordonnance de non-publication.

Plus tard, elle s’est mise à répondre à une série de questions ne plus se souvenir de rien. « J’ai oublié encore, je veux partir d’ici, j’ai hâte de me coucher chez moi. » Mais le témoin s’est fait plus loquace lorsque le procureur de la Couronne, Me Pascal Dostaler, lui a rafraîchi la mémoire en diffusant sa déclaration vidéo aux enquêteurs. Elle y raconte d’ailleurs avoir rencontré l’accusé à 15 ans, puis l’avoir revu à presque 18 ans.

Le procès se poursuit ce matin. L’accusé est défendu par Me Serge Lamontagne et Me Roucha Oshriyeh.