La SAVAC, qui dit faire la promotion des droits des victimes d’actes criminels, sollicite des dons en argent comptant à Montréal et sur la Rive-Sud.

Le Réseau des centres d’aide aux victimes d’actes criminels (CAVAC) se dit « énormément préoccupé » par les pratiques d’un OBNL au nom semblable au sien – la SAVAC – qui récolte des dons en argent comptant dans le « Montréal sous-terrain » et sur la Rive-Sud, en faisant signer une pétition aux passants pour lutter contre l’intimidation.

Fondée en 2014 par Kathleen Chenard-Santerre (une ancienne employée de la SPA Canada, organisme au sujet duquel nous avons écrit lundi) et son conjoint Duy-Viet Le, la SAVAC cherche actuellement sur Kijiji des agents de sensibilisation pour « interpeller, sensibiliser et éduquer les passants à différents enjeux touchant le phénomène de l’intimidation ».

Officiellement enregistré sous le nom de Groupe de défense et de promotion des droits des victimes d’actes criminels, l’OBNL n’affiche pas son adresse postale sur son site internet. Ses documents d’entreprise renvoient à une case postale de Verdun.

Trois personnes ont affirmé que ses agents tirent 50 % de commission sur chaque don récolté, ce qui peut représenter des « honoraires moyens de 21 $/heure à 28 $/heure », selon l’annonce publiée sur Kijiji.

Le nom de SAVAC fait penser à celui des CAVAC – les centres d’aide aux victimes d’actes criminels –, un réseau d’organismes d’aide et d’accompagnement pour les victimes de crimes, dont les intervenants sont notamment présents dans les postes de police et les palais de justice. Le réseau des CAVAC est financé par le Fonds d’aide aux victimes d’actes criminels, qui relève du ministère de la Justice.

Mais la SAVAC n’offre pas de tels services, affirment différentes sources. L’organisme n’a pas été en mesure de nous fournir un rapport annuel de ses finances et de ses activités. Son site internet n’a pas été mis à jour depuis décembre 2014, selon nos vérifications sur Internet Archives.

Mme Chenard-Santerre et M. Le, à qui nous avons laissé plusieurs messages depuis le 17 avril, n’ont pas donné suite à nos demandes d’entrevue.

« On ne cautionne pas cette approche »

« C’est extrêmement confus et ça nous préoccupe énormément », lance Marie-Christine Michaud, porte-parole du réseau des CAVAC, qui dit n’avoir « aucun rapport » avec la SAVAC.

« Ce qui nous préoccupe avec ce type d’organisme, c’est les demandes de dons. On ne cautionne pas cette approche. Nous, on ne fait pas de demande de dons à des personnes victimes. Les gens pourraient penser qu’il s’agit d’un service d’aide, alors que la mission n’est pas si claire quand on va sur leur site internet », ajoute Mme Michaud.

« On demande aux gens d’être vigilants et bien certains de la teneur de l’information avant de donner de l’argent. On n’est vraiment pas en arrière de ce type de façon de faire. » — Marie-Christine Michaud, porte-parole du réseau des CAVAC

Charles Chabod, un ancien agent de sollicitation de la SPA Canada qui a aussi travaillé pour la SAVAC, qualifie cet OSBL d’« organisme bidon ». « Tu ne vois jamais leurs bureaux, ils t’expliquent un peu comment ça marche, ils t’expliquent un peu le pitch, mais c’est nébuleux », soutient-il.

Poursuite de la SPA Canada

En 2017, la SPA Canada a intenté une poursuite contre la SAVAC, Kathleen Chenard-Santerre et Duy-Viet Le, les accusant d’avoir plagié ses « techniques uniques » en matière de « signature de pétition, de collecte de fonds et sollicitations ».

L’organisme de défense des animaux a demandé à la cour une injonction ordonnant à la SAVAC de « cesser toutes les activités liées à la sollicitation dans les rues, métros et tout autre endroit du centre-ville de Montréal ». Dans la poursuite civile entendue en Cour supérieure du Québec, la SPA Canada allègue que la SAVAC sème la confusion et induit en erreur les donateurs qui pensent avoir affaire à la SPA Canada. 

Le juge Brian Riordan a partiellement accordé l’injonction, ordonnant à la SAVAC de cesser d’utiliser les couleurs, logos ou dessins de la SPA Canada, et de « ne pas reproduire le modèle d’affaires de la demanderesse en utilisant un pot en bandoulière et en faisant des pétitions avec une section “dons” ».

La SPA Canada, qui affirme ne plus utiliser le financement par pétition depuis avril 2018, n’a pas voulu commenter son litige l’opposant à la SAVAC, puisque l’affaire est devant les tribunaux.