C'est parce qu'il ne reconnaît pas l'autorité des policiers municipaux et provinciaux que Sébastien Théodore a refusé de s'arrêter, après avoir été interpellé par un agent de la Sûreté du Québec (SQ), samedi dernier à Montréal, ce qui a mené à une poursuite policière au cours de laquelle une femme a été gravement blessée.

Le Longueuillois de 40 ans, qui comparaissait jeudi au palais de justice de Montréal pour tenter de recouvrer sa liberté, affirme qu'il n'appartient pas au mouvement des Freemen on the land, ces « citoyens souverains » qui refusent de se soumettre aux lois.

Mais le discours qu'il tient se rapproche beaucoup de leur mouvance. Le tribunal a visionné une vidéo, diffusée sur en juillet dernier sur Facebook, dans laquelle il traite les juges, les policiers et tout l'appareil judiciaire de « traîtres », d'« usurpateurs » et de « mangeux de marde », expliquant que les lois québécoises sont illégales.

« Je n'ai aucune intention d'obéir aux autorités municipales et provinciales. Si j'ai quelque chose à traiter, je vais le faire avec la GRC [Gendarmerie royale du Canada]. » - Sébastien Théodore dans la vidéo

Si Sébastien Théodore a refusé d'obéir au policier de la SQ, c'est d'ailleurs parce qu'il se rendait au bureau de la GRC, puisqu'il estime que seule la loi constitutionnelle fédérale est légale, selon ce qui a été présenté en cour.

Il avait déjà prévenu qu'il ne s'arrêterait pas en cas d'interception par un policier. « Si un comique décide de tirer du gun, vous allez être obligés de me tuer, gang de pourris. Et je vais être en situation de légitime défense contre une tentative d'arrestation illégale et arbitraire », lance-t-il dans un autre extrait de la vidéo.

Dans une autre intervention diffusée sur Facebook en août dernier, il évoque la possibilité de s'armer pour se protéger.

EN CONFLIT AVEC LONGUEUIL

Sébastien Théodore est en conflit avec la Ville de Longueuil depuis qu'il a reçu une contravention pour des vitres teintées sur sa voiture. L'affaire a dégénéré au point que son permis a été suspendu.

Mais il continuait à conduire, et c'est pour cette raison qu'un policier de la SQ l'a intercepté, alors qu'il traversait le pont Jacques-Cartier en direction de Montréal. Il a ensuite été suivi par plusieurs voitures de patrouille du SPVM, qui ont tenté de l'arrêter, sans succès.

La poursuite d'environ six minutes s'est déroulée en partie à basse vitesse, mais l'accusé aurait ensuite emprunté des rues à contresens et accéléré au-delà des limites permises, jusqu'à ce qu'il entre en collision avec une voiture de police.

Les deux véhicules se sont retrouvés sur le trottoir, rue Sherbrooke, blessant gravement une femme de 42 ans qui se trouve toujours à l'hôpital.

Le Bureau des enquêtes indépendantes examine les circonstances de l'événement. Selon le procureur de la Couronne, Me Simon Boulianne, on ne sait pas encore si c'est la voiture de police ou celle de l'accusé qui a heurté la dame.

« C'EST LA VÉRITÉ »

À la demande de la Ville de Longueuil, le tribunal a exigé, le 5 novembre, que Sébastien Théodore retire des propos jugés diffamatoires envers ses employés sur sa page Facebook, ce qui n'a toujours pas été fait.

Le jour où il a reçu la décision du juge, Théodore a diffusé une vidéo dans laquelle il affirme qu'il n'a pas l'intention de retirer quoi que ce soit. « Je ne vais rien enlever sur mes publications Facebook, parce que c'est la vérité que je dis », affirme-t-il.

« J'en ai rien à foutre du jugement du juge [Stéphane] Sansfaçon, qui est corrompu, qui siège illégalement, anticonstitutionnellement et criminellement. » - Sébastien Théodore dans la vidéo

En lien avec la poursuite policière de samedi dernier, Théodore doit répondre à des accusations de conduite dangereuse, d'avoir fui les policiers et de négligence criminelle, ces trois accusations aggravées par les blessures subies par la piétonne. Il risque une peine maximale d'emprisonnement de 14 ans.

Le procureur de la Couronne s'est opposé à la remise en liberté de l'accusé, citant notamment ses propos après la décision du 5 novembre qui font douter de son intention de respecter les conditions qui lui seraient imposées, comme l'interdiction de conduire et de fréquenter les réseaux sociaux. « Ce n'est pas un écart de conduite isolé, a souligné Me Boulianne. Le non-respect des autorités et du système de justice, c'est un mode de vie pour monsieur, une philosophie qu'il a embrassée. »

L'avocat de Théodore, Me Mathieu Bédard, a, de son côté, fait valoir que l'accusé était sincèrement désolé des blessures subies par la piétonne et qu'il n'essaierait pas de se soustraire à la justice. Il a affirmé que « les policiers avaient aussi leur part de responsabilité », puisqu'une sergente du SPVM avait demandé aux agents de cesser la poursuite policière, une consigne qui n'aurait pas été respectée.

Le juge Pierre Labelle fera savoir le 27 novembre s'il permet à l'accusé d'être libéré.

Capture d'écran

Un des messages publiés par Sébastien Théordore sur sa page Facebook.