À son arrivée aux urgences psychiatriques de l'hôpital Notre-Dame, le soir du 13 juin 2012, Idelson Guerrier se sentait suivi depuis deux semaines, croyait qu'il y avait des espions autour de lui et que sa femme faisait partie du complot. Le lendemain matin, il niait avoir des hallucinations, promettait de mentir si le questionnaire s'étirait en longueur et ne voulait plus être hospitalisé.

« Je ne le croyais pas qu'il n'avait rien. Il faut se méfier. Mon expérience me disait qu'il y avait quelque chose, qu'il ne me disait pas les vraies affaires », a expliqué le psychiatre André Gamache, hier, alors qu'il témoignait au procès de M. Guerrier. Ce dernier, maintenant âgé de 35 ans, est accusé d'avoir tué avec préméditation deux patients et d'avoir tenté d'en tuer deux autres, dans les jours qui ont suivi son hospitalisation à l'hôpital Notre-Dame, en juin 2012. Il les aurait étouffés avec une serviette.

Le Dr Gamache a été le premier psychiatre à évaluer M. Guerrier. Cela s'est produit le matin du 14 juin. Lui et un médecin externe ont consulté le dossier, puis se sont entretenus avec M. Guerrier pendant une trentaine de minutes environ. Le Dr Gamache a indiqué quatre diagnostics possibles, avec un penchant pour le premier, soit trouble délirant de persécution paranoïde. Les trois autres étaient : trouble psychotique induit par une substance (cannabis), trouble psychotique bref ou début de schizophrénie paranoïde.

« Au moment où je le vois, ce sont des possibilités. Je ne peux pas préciser dès le début. Le but de l'hospitalisation, c'est de préciser et confirmer un diagnostic, et traiter », a expliqué le psychiatre.

M. Guerrier est arrivé en ambulance le soir du 13 juin, après deux appels au 9-1-1 en provenance du domicile de sa mère, à Montréal-Nord. Guerrier vivait habituellement à Joliette avec sa femme et leurs deux enfants. Mais depuis quelques jours, il était chez sa mère. Il avait quitté son travail chez Olymel depuis trois ou quatre jours, parce qu'il ne s'y sentait pas bien, disait-il. Le matin du 14, M. Guerrier niait des choses qu'il avait dites la veille. Il minimisait aussi sa consommation de cannabis. Ce n'était plus 28 grammes de cannabis tous les dix jours, mais un joint en quelques jours.

À ce sujet, le Dr Gamache a signalé que M. Guerrier a obtenu un résultat « positif » à un test de cannabis et d'Ativan, aux urgences. Il ne peut toutefois savoir la quantité qu'il avait consommée.

Le Dr Gamache a noté que M. Guerrier n'avait pas d'autocritique et qu'il n'avait pas un bon contact avec la réalité. Il lui a donné une note de 45 sur 100 à « l'axe 5 », une donnée mathématique utilisée en psychiatrie. Pour se donner une idée, une note de 100 serait attribuée à une personne parfaitement normale et fonctionnelle. Une note de zéro irait à une personne en état de catatonie.

Refuse le transfert

Le psychiatre a voulu transférer le patient à l'hôpital de Joliette, puisqu'il résidait à cet endroit. Mais M. Guerrier a refusé. La famille refusait également le transfert. Le Dr Gamache a décidé de le garder à Notre-Dame, en psychiatrie. Heureusement, il y avait un lit libre dans la section des soins intensifs, au 8e étage.

« Ce n'était pas médicalement requis, mais il y avait un risque de fugue. J'ai été prudent. Les étages 6, 7 et 8 sont plus sécuritaires. Les portes et les ascenseurs sont barrés. Ce sont des endroits plus surveillés », a expliqué le médecin.

D'autres médecins et infirmières viendront témoigner au cours de ce procès devant jury, qui doit durer de 10 à 12 semaines.

On sait que Gaétan Sénécal a été trouvé mort dans son lit le 16 juin et Claude Courtemanche, le 21 juin. Les victimes alléguées des tentatives de meurtre sont des femmes, Exytyxia Tsidanoulis, le 16 juin, et Ioland Bertocchi, le 22 juin. Ils étaient tous hospitalisés en psychiatrie, en même temps que M. Guerrier.