Le gouvernement Harper assure qu'il ne bafouera pas les libertés civiles en légiférant pour contrer la promotion du terrorisme, mais Amnistie internationale redoute malgré tout des dérapages.

Le ministre de la Sécurité publique, Steven Blaney, doit présenter vendredi une nouvelle pièce de son arsenal antiterroriste, qui devrait aussi comprendre des mesures visant à empêcher les terroristes de voyager et de faire du recrutement.

«Clairement, il est important de combler les lacunes que nous avons (...) et c'est ce que nous avons l'intention de faire», a-t-il plaidé mardi matin en mêlée de presse au parlement.

Les nouvelles dispositions concernant la glorification du terrorisme ne mettront pas en péril les libertés civiles, a poursuivi M. Blaney.

«Comme je l'ai indiqué, comme le premier ministre (Stephen Harper) l'a clairement indiqué, le projet de loi qui sera déposé ce vendredi respectera rigoureusement l'ensemble des lois canadiennes, la Constitution et la Charte des droits», a-t-il déclaré.

Amnistie internationale veillera au grain, a prévenu mardi la directrice de l'organisation au Canada francophone, Béatrice Vaugrante.

«Oui, on peut donner plus de pouvoir aux agences de sécurité et aux forces policières, mais comment va-t-on déterminer quels propos sont permis et quels autres sont interdits?» a-t-elle demandé.

«La liberté d'expression, évidemment qu'elle dérange. Évidemment qu'il y a des propos qui vont déranger, heurter. Mais si on y met déjà des blocs (...), c'est un chemin dangereux», a suggéré Mme Vaugrante en entrevue téléphonique.

En France, les procédures judiciaires relatives au délit d'«apologie du terrorisme» se sont multipliées dans la foulée de l'attentat survenu dans les locaux de l'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo.

Entre la journée de l'attaque, le 7 janvier, et le 21 janvier, le ministère français de la Justice recensait 117 procédures pour «apologie du terrorisme» et «provocation à la haine raciale» sur 251 procédures pénales ouvertes depuis l'attaque, selon le quotidien Le Monde.

Le ministre Blaney n'a pas voulu commenter cette situation, mais il s'est dit convaincu que le «contexte actuel» commandait une clarification de la définition de promotion du terrorisme dans les textes de loi au Canada.

Puisque l'on assiste, d'après lui, «à une recrudescence de l'incitation à l'utilisation de la violence par le terrorisme», il est nécessaire d'agir, et ce, même si le Code criminel contient déjà des dispositions interdisant la propagation de propos haineux et l'incitation à la violence.

Steven Blaney a déposé l'automne dernier le projet de loi C-44, qui clarifie les pouvoirs du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS). Il est toujours à l'étude.