Après avoir passé près de 20 ans de sa vie en prison, celui que l'on surnomme «le pilote de Casey», Raymond Boulanger, a obtenu sa libération d'office il y a une dizaine de jours. D'ici à la fin complète de sa sentence, Boulanger, 65 ans, devra toutefois respecter deux conditions : fournir régulièrement ses états financiers et éviter toute personne qui a des antécédents criminels.

Le pilote de brousse et aventurier s'était fait connaître en novembre 1992, alors qu'il avait été arrêté à la suite de l'une des plus importantes importations de cocaïne de l'histoire du Canada. Quelques heures plus tôt, Boulanger avait décollé de la Colombie avec un Convair bourré de 4000 kilos de cocaïne et de dizaines de réservoirs d'essence permettant à ses complices colombiens qui l'accompagnaient de faire le plein en vol. Mais l'appareil avait été repéré par les autorités peu après son décollage et Boulanger avait été pourchassé par deux F-18 de l'armée canadienne qu'il avait réussi à semer. Mais le coup avait raté car pour échapper à ses poursuivants, Boulanger avait dû changer sa route, ce qui a rallongé son vol. Des complices, qui l'attendaient au bout de la piste avec des véhicules pour décharger la drogue, s'étaient découragés et avaient déjà quitté les lieux. Boulanger et ses complices avaient été arrêtés peu après leur atterrissage sur l'ancienne piste de l'armée de Casey, dans la Haute-Mauricie. Raymond Boulanger avait fait un clin d'oeil resté mémorable aux photographes de la presse peu après son arrestation. Il n'a jamais donné les noms des commanditaires de cette spectaculaire importation mais elle aurait été commandée par la mafia italienne.

Un roman

La vie de Raymond Boulanger est digne d'un film d'aventures. Il est né dans la région de Rimouski, a obtenu ses permis de pilote très jeune et a commencé à transporter de la drogue durant les années 70. C'est à cette époque qu'il a connu des responsables des cartels colombiens pour lesquels il a formé des pilotes de brousse et aménagé des pistes d'atterrissage en pleine jungle.

Il a dit avoir travaillé pour la CIA durant les années 80, alors que les services d'espionnage américain supportaient les contras contre les troupes gouvernementales sandinistes de Daniel Ortega au Nicaragua.

À deux reprises, Raymond Boulanger a été arrêté et est parvenu à s'évader en 1998 et 2000. Durant l'une de ses cavales, il a même été enlevé en Colombie par des rebelles d'un groupuscule marxiste et ce sont les cartels qui ont négocié sa libération en versant une rançon. Ces deux évasions n'ont rien fait pour réduire le séjour en prison de Boulanger qui a été condamné à 23 ans en 1993.

Selon les commissaires aux libérations conditionnelles, Boulanger, qui s'est mis à peindre, derrière les barreaux, a maintenu un comportement conformiste en prison et aurait coupé ses liens avec la mafia. Le sexagénaire qui, aux dernières nouvelles, était commis aux effets personnels en prison à 6,90$ par jour, dit n'avoir aucun problème financier et dirigerait une fondation en Colombie. L'agent de probation de Boulanger a toutefois été incapable d'avoir les détails des holdings que ce dernier détient et c'est la raison pour laquelle les autorités lui demandent de fournir des états financiers.

Durant une entrevue au Journal de Montréal en 2011, Raymond Boulanger a déclaré n'avoir aucun regret et vouloir prendre sa retraite. Il a un ami très proche dans la région de Montréal pour lequel il va travailler.