Un frère de Sainte-Croix qui a notamment travaillé comme préfet de discipline et comme professeur au Collège Notre-Dame de Montréal fait l'objet d'un mandat d'arrestation lancé par le SPVM pour de présumées agressions sexuelles sur des mineurs, a appris La Presse.

Le frère Georges Sarrazin, maintenant âgé de 91 ans, serait l'un des premiers membres de cette congrégation religieuse à faire face à la justice pour des allégations en lien avec des actes de nature pédophile.

Le mandat s'appuie sur neuf accusations criminelles: quatre de grossière indécence, quatre d'attentat à la pudeur et une de sodomie.

Selon les policiers, les actes ont été commis à l'endroit de trois enfants différents entre 1966 et 1980, toujours à Montréal. Seules leurs initiales sont indiquées dans le document.

Pendant de nombreuses années, notamment dans les années 60 et 70, le frère Sarrazin a enseigné et a été responsable de la discipline au Collège Notre-Dame de Montréal. Les dates exactes de ses affectations ne sont pas connues.

Les accusations correspondent à celles prévues au Code criminel tel qu'il était rédigé à l'époque des faits. Jusqu'en 1982, l'accusation d'agression sexuelle n'existait pas et le viol ne punissait que les relations sexuelles non consensuelles entre un homme et une femme.

L'adresse donnée sur le mandat correspond à la résidence des frères de Sainte-Croix, surnommée le «grand Saint-Joseph». Sur place, le frère Gilles Côté, supérieur de l'endroit, n'a pas voulu évoquer la situation avec La Presse, selon l'infirmière qui a pris l'appel. Il «refuse de parler à quiconque», a-t-elle indiqué, après que son interlocuteur s'est identifié comme journaliste.

Il a été impossible de s'entretenir plus de quelques secondes avec Georges Sarrazin, âgé de 91 ans et souffrant de profonds problèmes d'audition.

Nonagénaire poursuivi

Selon l'un des meneurs d'un recours collectif lancé contre les frères de Sainte-Croix il y a quelques années, il est vital de lancer des poursuites criminelles contre tous les présumés agresseurs, malgré l'âge de ceux qui devront s'en défendre.

Même s'il accepte de qualifier la question de «dilemme éthique», Sébastien Richard croit tout de même que les individus soupçonnés d'avoir agressé sexuellement des enfants doivent répondre de leurs actes passés étant donné leur gravité. «Les conséquences de ces agressions sont extrêmement importantes, a-t-il expliqué à La Presse. Je peux vous dire qu'il y a des [victimes] qui ne sont pas parvenues à reprendre contrôle de leur vie. Elles ne sont pas parvenues à reprendre une vie digne de ce nom.»

Il peut être important pour plusieurs victimes de confronter leur agresseur, a ajouté Sébastien Richard. Et le temps presse: plusieurs des frères de Sainte-Croix ayant enseigné dans les années 50, 60 et 70 sont déjà morts ou très âgés.

M. Richard jure avoir été agressé sexuellement par le frère Claude Hurtubise, lui aussi au Collège Notre-Dame de Montréal. Le religieux a toutefois été acquitté de cette accusation en 2006.

Dédommagement historique

En 2010, l'émission Enquête, sur les ondes de Radio-Canada, a diffusé les témoignages de multiples présumées victimes des frères de Sainte-Croix qui ont fréquenté l'un de leurs établissements d'enseignement.

En octobre 2011, les frères de Sainte-Croix ont accepté de verser 18 millions$ à plusieurs victimes d'agressions sexuelles commises par des membres de leur communauté. Ils se sont aussi excusés pour ces actes commis pendant des années à Montréal, à Saint-Césaire et à Pohénégamook.

«Je déplore sincèrement ces fautes et tiens à présenter, au nom de la Congrégation de Sainte-Croix, mes excuses pour la souffrance et l'affront causés aux victimes de ces abus, avait alors affirmé Jean-Pierre Aumont, supérieur de la Congrégation de Sainte-Croix, par voie de communiqué. Des préjudices ont été causés, et nous avons pris les dispositions pour les réparer.»