Des milliers de familles québécoises ont passé le réveillon de Noël aux chandelles à cause des pannes d'électricité provoquées par le mauvais temps. Une nouvelle tempête doit frapper aujourd'hui le sud-ouest du Québec, ce qui compliquera la vie des voyageurs, mais fera le bonheur des amateurs de ski.

Cinq jours après la tempête qui a laissé jusqu'à 60 cm de neige au nord du Saint-Laurent, près de 2000 foyers sont toujours privés d'électricité et 800 travailleurs d'Hydro-Québec n'ont pu rentrer à la maison pour fêter Noël.

C'est évidemment peu d'abonnés en regard des 130 000 qui ont perdu l'électricité en Outaouais, dans les Laurentides et dans Lanaudière au plus fort de la panne, mais leur rebranchement est très complexe.

«C'est une situation exceptionnelle. On ne voit même pas ça une fois par année», explique la porte-parole d'Hydro-Québec, Geneviève Chouinard.

La neige laissée par la tempête était épaisse et très lourde, car elle est tombée alors que le mercure atteignait à peine le point de congélation. Quand le temps s'est refroidi, des milliers d'arbres ont cassé et se sont abattus sur des lignes électriques, dont de longues sections sont tombées au sol.

C'est un total de

1300 pannes auxquelles ont dû remédier les 800 monteurs de lignes d'Hydro-Québec venus de partout au Québec pour participer à l'effort. Et ces 1300 réparations n'étaient pas toujours simples à faire.

«Il y a des endroits où il faut dégager la route, couper des arbres. Il faut parfois se rendre sur les lieux en motoneige, même en raquettes, grimper aux poteaux avec les éperons, faire appel aux émondeurs», décrit Geneviève Chouinard.

Un monteur envoyé dans le nord de l'Outaouais a raconté à La Presse qu'il a dû marcher cinq kilomètres en raquettes pour se rendre sur les lieux d'une réparation, tout en coupant plusieurs arbres et branches au passage avec sa scie mécanique.

«Ça fait à peu près huit heures de travail pour rebrancher deux ou trois maisons», explique-t-il.

C'est la raison pour laquelle le travail peut sembler si long.

Mme Chouinard estimait hier soir que 99% des pannes seraient résolues en fin de journée et que seuls des cas très complexes en secteur isolé seraient encore sans électricité, comme Sheila Eskenazi et Joseph Graham, qui habitent un chemin privé en bordure d'un lac, à Sainte-Lucie-des-Laurentides. Eux et deux voisins étaient toujours sans électricité hier soir. Un arbre est tombé et a arraché les fils électriques, qui sont coincés dans un amas de branches gelées, près de leur résidence.

Cependant, personne ne pouvait être aussi prêt qu'eux à affronter ce désagrément.

Malgré le froid, il règne dans leur maison une douce et réconfortante chaleur. On ne perçoit pas chez eux le dépit d'autres personnes privées d'électricité. Il faut dire que le couple de retraités pratique l'art de l'autosuffisance non seulement alimentaire, mais aussi énergétique.

Dans leur sous-sol, on trouve un poêle à combustion lente, au-dessus duquel une grille en fonte facilite la diffusion de la chaleur aux étages supérieurs. La cheminée centrale, en brique, dégage elle aussi de la chaleur. Dans la cuisine, le couple possède une cuisinière électrique, comme tout le monde, mais le plan de travail, dont un pan se soulève, dissimule trois brûleurs au gaz alimentés par une bombonne de propane qui se trouve à l'extérieur.

Pour ce qui est de la douche, ils possèdent une génératrice, qu'ils ne font fonctionner que pour chauffer l'eau.

Noël à l'ancienne

«On est bien. C'est silencieux. Il n'y a pas le bruit du frigo et des autres appareils. C'est certain que ça change un peu nos plans, parce qu'on ne peut pas quitter la maison plus de quelques heures

- il faut alimenter le poêle -, mais nous sommes bien. Plusieurs villégiateurs du coin n'ont pas eu envie de vivre un Noël à l'ancienne et ne sont pas venus à leur chalet», dit Mme Eskenazi.

Privés d'électricité pendant près de cinq jours, Noël et Bibi Burton, de Val-David, ont eux aussi usé de créativité pour améliorer leur qualité de vie malgré la panne: «On a réussi à se faire du très bon café en passant les grains dans notre vieux hachoir à viande, puisque notre moulin à café est électrique», a raconté Mme Burton.

Mais tous n'étaient pas aussi joyeux. «Il a fait pas mal froid dans la maison», a lancé un résidant du 6e Rang, à Sainte-Lucie-des-Laurentides, qui a passé cinq jours sans électricité.

«Nous, on a un puits, la pompe est électrique. On n'a pas eu d'eau pendant quatre jours. On a fait fondre la neige, restreint l'utilisation d'eau, et nous sommes allés prendre nos douches ailleurs. On a un poêle. Ça devient une nécessité, dans le Nord», indique Manon Bélair, de Morin-Heights.