Jugée pour des accusations d'intimidation et de menaces envers une procureure de la Couronne, Marian Vermes s'est défendue, jeudi, en disant qu'il ne s'agissait que de mots. La femme de 64 ans, qui en paraît facilement 10 de plus, a donné l'exemple de Lady Gaga qui, dans une de ses chansons, chante à son amoureux: «Je veux que tu meures.»

«Souhaiter la mort d'une personne ne veut pas dire qu'on veut le tuer. Le souhait n'est pas une action. Je souhaite gagner au loto», a illustré Mme Vermes, lors d'une longue diatribe qui s'adressait au juge Claude Parent. Emprisonnée depuis 17 mois, la femme s'est aussi plainte de ses conditions de détention et de la cruelle séparation d'avec ceux qu'elle appelle ses enfants, sa «seule raison de vivre». Il s'agit de quatre chiens.

Mme Vermes a été mise en détention préventive il y a 17 mois parce qu'on l'accusait d'avoir cherché à faire éliminer une femme avec qui elle avait vécu pendant plusieurs années et qui avait obtenu, par jugement, leur maison. Elle avait parlé de ses sombres desseins à un neveu, qui a alerté la police. C'est dans le cadre du processus relatif à ce dossier, ainsi qu'à d'autres de moindre importance, que Mme Vermes aurait menacé la procureure Catherine Perreault.

L'événement est survenu le 19 juillet dernier, lors d'une audition tenue devant le juge Éric Downs. Il s'agissait d'une procédure pour s'assurer que l'accusée serait représentée par avocat au cours de son procès. Il faut dire qu'elle a eu plusieurs représentants. Madame est bien connue chez les avocats de la défense, elle n'est pas une cliente facile. Lors de cette audition, Mme Vermes a injurié la Me Perreault à plusieurs reprises et lui a dit: «Je voudrais que tu sois morte, que tu disparaisses. La dernière fois que j'ai dit ça, c'est arrivé.»

Jeudi, Mme Vermes a expliqué qu'elle avait alors fait allusion à un médecin qui avait mal soigné sa mère par le passé. Furieuse, elle avait souhaité la «disparition» du médecin. Elle a été exaucée. Il a eu le cancer et en est mort. «J'étais contente», a lancé Mme Vermes, hier.

Les moyens de ses ambitions

La procureure de la Couronne Catherine Perreault a expliqué, hier, qu'elle ne prenait pas les menaces de l'accusée à la légère. «Je l'ai toujours considérée comme dangereuse. Je connais le profil de madame, je connais ses ressources», a fait valoir la procureure, en faisant allusion à la fortune que posséderait l'accusée.

Elle pense aussi que l'accusée est une femme très intelligente, qui rectifie ses propos après coup, pour faire du «damage control effect».

Mme Vermes admet que le jour en question, elle a fait une «explosion verbale» pour «ventiler [sa] colère». La vie est dure pour elle, a-t-elle fait valoir en tremblant et en sanglotant. Elle est enfermée 23 heures sur 24 dans une minuscule pièce sombre sans fenêtre à la prison Tanguay. Elle n'a pas de visite, mange toujours seule dans sa cellule. Son seul compagnon est le «bol de toilette», a-t-elle dit. De fait, en raison de son caractère particulier, Mme Vermes ne peut être mêlée à la population carcérale. Elle se dit malade et prétend avoir des pertes de mémoire et des dommages au cerveau. Mais elle s'exprime de façon remarquablement claire.

Il y a une quinzaine d'années, lors de ses premiers démêlés judiciaires, Mme Vermes avait été déclarée criminellement non responsable en raison de troubles mentaux. Mais depuis, les autres évaluations la jugent apte. Son avocat, Me Yves Vaillancourt, a soutenu qu'elle n'avait pas l'intention de menacer ou d'intimider la procureure. Elle exprimait sa douleur, sa colère. C'est un procureur de Québec, Jean Caron, qui a officié pour la Couronne.

Le juge Claude Parent doit rendre jugement aujourd'hui. Ultérieurement, Mme Vermes devra aussi répondre à des accusations de fraudes, de faux documents et de voie de fait armée contre un garagiste. En ce qui concerne le complot contre son ex-colocataire, Mme Vermes a plaidé coupable en août à des accusations réduites d'avoir conseillé de commettre une séquestration, d'extorsion et de voie de fait. Elle a écopé d'une peine de six mois, qui s'est ajoutée à sa détention préventive.