Au deuxième jour du procès qui oppose le Dr Gaétan Barrette et sa femme à 12 médecins de l'hôpital Maisonneuve-Rosemont, le célèbre médecin qualifie cette querelle de banal conflit de personnalités.

Certes, reconnaît-il, sa conjointe, la Dre Marie-Josée Berthiaume, ne met pas de gants pour dire ce qu'elle pense. «Il est possible que ça froisse des gens. Elle est directe.» Lui-même admet qu'il a parfois un langage grossier en privé.

Il croit néanmoins que cette affaire aurait pu se régler par une intervention adéquate de l'ex-chef du service de radiologie, Robert Filion. «Tu as un travail de conciliation à faire qui n'a pas été fait. Tu ne le gères pas, gère-le», lui a-t-il lancé après la fronde des collègues contre sa femme, à l'automne 2009.

Rappelons que le litige oppose la Dre Berthiaume et le Dr Barrette aux 12 autres radiologistes du service. Mme Berthiaume leur réclame 250 000 $ pour harcèlement, dénigrement, humiliation et stress.

De leur côté, les 12 médecins se plaignent du comportement individualiste et dénigrant de la Dre Berthiaume et lui réclament 170 000 $. Dans leur requête, ils déplorent aussi l'attitude méprisante du Dr Barrette, qui contribuerait au pourrissement de l'ambiance de travail.

À l'origine, «c'est un conflit de personnalités entre ma conjointe et le Dr Carignan, une affaire de maternelle», estime le Dr Barrette.

De 1991 à 2008, Gaétan Barrette a dirigé le service de radiologie de l'hôpital Maisonneuve-Rosemont. En parallèle, il a été, à partir de 2006, président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec.

Présumées erreurs médicales

Lors de l'audience d'hier, le Dr Barrette est longuement revenu sur la question de ses présumées erreurs médicales. À titre de chef, il a été président du comité d'évaluation de l'acte médical jusqu'en 2008. Il dit avoir mis en place un protocole qui visait à «stimuler la qualité» et non à prendre les radiologistes en défaut.

À cet égard, le Dr Stéphane Carignan était responsable d'organiser les réunions d'évaluation de situations problématiques et n'était aucunement responsable de l'acte médical comme il le prétend, explique le Dr Barrette. «Il avait un rôle clérical [sic], de secrétaire».

Le Dr Barrette a indiqué, en donnant des exemples, qu'il avait parfois dû, comme chef, intervenir pour corriger certains problèmes d'interprétation de radiologie de ses collègues. Il a expliqué en détail les lacunes de deux médecins présents dans la salle d'audience. Il a nommé ceux qui s'en plaignaient, également présents, ce qui a jeté un froid dans la salle.

Dans la matinée, le Dr Carignan a été de nouveau interrogé sur les erreurs d'interprétation qui auraient été décelées dans les rapports du Dr Barrette. Selon ses affirmations, c'est lui qui a soulevé 16 des 33 erreurs signalées au Collège des médecins. Les autres l'auraient été par huit autres collègues.

Pourquoi cibler le Dr Barrette? «Parce que j'ai vu que de nombreux cas surgissaient dans mon travail quotidien, que ça s'accumulait rapidement. Ça devenait comme une épidémie de grippe. Les cas du Dr Barrette recelaient un nombre d'erreurs nettement au-dessus de la moyenne. Et ce n'était pas des niaiseries ou des cas mineurs, mais des cas préjudiciables aux patients», a affirmé le Dr Carignan, qui n'a trouvé aucune erreur d'interprétation dans le travail de la Dre Berthiaume.

Au mois de juin, La Presse a divulgué l'existence de ces présumées erreurs, ce qui vaut au journal d'être poursuivi en diffamation par le Dr Barrette. Hier, tous les médecins poursuivis ont affirmé ne pas être à l'origine de la fuite.

Par ailleurs, le Dr Barrette a expliqué qu'une des causes du conflit est le mode de partage des revenus au service, sous la société SORAD. Tous les radiologistes gagnent le même salaire, peu importe le volume de travail. Or, affirme-t-il, la Dre Berthiaume abattait un volume de travail très élevé du fait de la croissance de la demande d'examens musculo-squelettiques - son champ d'expertise - et de sa charge de travail avec les résidents universitaires.

Le Dr Barrette dit que sa femme pratique l'excellence, qu'elle a une passion pour l'enseignement et un grand sens du devoir. «Il y a des listes d'attente. Alors si elle avait le choix entre jouer au golf, disons, ou soigner des patients, elle choisit le soin des patients.»