Un chrétien, un pêcheur, un chasseur, un homme d'affaires tenace et un brin excentrique avec plein de projets - peut-être même un peu trop-, un retraité, un être généreux qui aime le monde... Mais un tueur? Ça, personne ne s'y attendait.

Dans la région de La Conception, où Richard Henry Bain habite et exploite une pourvoirie, la nouvelle de son arrestation comme suspect pour l'attentat du Métropolis a jeté la consternation parmi les résidants. À commencer par les gens de l'église évangélique baptiste que M. Bain fréquente occasionnellement depuis quatre ans. «Il n'était pas membre, mais il venait quatre ou cinq fois par année», a affirmé le pasteur de l'église, qui préfère taire son nom.

M. Bain assistait à l'office du dimanche. Il croit l'avoir vu pour la dernière fois en juin. Il n'a alors rien remarqué de particulier. En voyant les images à la télé, il l'a immédiatement reconnu. Et il n'y comprend rien. «Ce qui nous surprend, c'est qu'on ne l'a jamais entendu parler de politique. Il n'a jamais parlé contre Mme Marois. Il avait même un drapeau du Québec à sa pourvoirie. Ça ne s'explique pas. Je pense qu'il avait des problèmes, qu'il était bipolaire.»

«Mercredi matin, un ami m'a appelé et m'a dit qu'il l'avait vu mardi matin, il était allé voter», a ajouté le pasteur.

«Je savais que c'était un [partisan de] Charest. Je voulais l'appeler pour lui tirer la pipe», a raconté un autre homme, qui connaît bien M. Bain et qui refuse lui aussi qu'on le nomme. Il a également été renversé en voyant les images. Il a reconnu M. Bain, malgré sa cagoule. «C'est celle qu'il met tout l'hiver», a-t-il dit.

L'homme a déjà fait affaire avec M. Bain. Il a fourni des chevaux aux clients qui voulaient se rendre à sa pourvoirie, au lac Wade - le chemin est difficilement carrossable. Même si leur collaboration avait cessé depuis un an environ, ils étaient en bons termes. L'homme assure que M. Bain est une bonne personne, mais il se sent un peu mal à l'aise de le dire étant donné qu'«une personne est morte». Il sait par ailleurs que cette pourvoirie «était son rêve depuis toujours».

M. Bain allait parfois au casino, mais l'homme ne pense pas qu'il avait des problèmes de jeu ou qu'il était un gros joueur. Il savait cependant que M. Bain est un homme malade, qu'il souffre de problèmes de santé mentale et qu'il était traité à Montréal. Il avait parfois des comportements un peu bizarres. Par exemple, lors de l'épidémie de grippe A (H1N1), il était craintif et avait fait des provisions importantes. Quand l'affaire s'est dégonflée, il les a données.

M. Bain est déjà arrivé chez lui à bord d'une limousine, alors qu'il s'en allait au casino. Il trouvait cela amusant. Une autre fois, il a atterri sur son terrain en hélicoptère, ce qui a effrayé les chevaux.

M. Bain était un bon vivant et un excellent chasseur. L'homme se rappelle qu'il est venu une fois avec une carabine, est allé un peu plus loin sur le terrain et, en peu de temps, avait déjà tué un chevreuil. «Des armes, il en avait, comme tous les chasseurs», dit-il.

À l'auberge Vallée de la Rouge, où M. Bain s'arrêtait parfois pour prendre un verre, on le décrit aussi comme un homme «gentil avec tout le monde», qui ne parlait pas de politique. «On parlait de tout et de rien. De niaiseries, de construction», racontent des clients, attablés sur la terrasse. «Je l'ai vu ici vendredi passé», assure André Champagne, qui dit n'avoir rien remarqué d'inhabituel. «Il était fin avec tout le monde», renchérit Mary Matthett, serveuse.