Sept ans après avoir perdu sa trace, la police italienne croit avoir retrouvé à Montréal une trafiquante internationale de haut calibre qui aurait trempé dans l'importation de cocaïne en Italie, en Allemagne et aux Pays-Bas avant de disparaître dans la nature.

Yocelin Yeli Castellano Rubio, alias Nancy, était recherchée depuis des années par les enquêteurs italiens qui avaient mis au jour son réseau de trafic de cocaïne.

Dans la «notice rouge» envoyée par Interpol aux services policiers de 187 pays, ils avaient inclus un avertissement au sujet de la Vénézuélienne, aujourd'hui âgée de 35 ans: «Attention, cette personne peut être dangereuse.»

La photo la plus récente qu'ils avaient de la suspecte a été prise à l'aéroport de Milan en 2005, alors qu'elle attendait vraisemblablement une des nombreuses «mules» de son organisation, c'est-à-dire un voyageur recruté pour passer la drogue à la frontière.

La suspecte avait réussi à échapper aux policiers, qui ignoraient où elle se trouvait jusqu'à l'an dernier

Un couple de Saint-Léonard

En avril dernier, à plus de 6000 km de Milan, la Gendarmerie royale du Canada (GRC) a mené une rafle contre plusieurs personnes de la région montréalaise soupçonnées d'avoir comploté pour importer de la cocaïne de la Colombie, du Venezuela, du Panama et de la République dominicaine.

L'enquête avait été menée grâce à un civil devenu agent d'infiltration pour la GRC. La police affirme que 17 suspects, dont certains entretenaient des liens avec les Hells, la mafia et le gang de l'Ouest, avaient trempé dans quatre complots visant l'importation de cargaisons allant de 40 à 275 kg de cocaïne.

L'un des suspects, Pedro Antonio Rodriguez Hinojosa, un Dominicain de 48 ans, habitait à Saint-Léonard avec sa femme. Celle-ci, alors enceinte, était présente lors de l'opération policière, mais n'était pas visée par les policiers. Elle a tout de même été interrogée sur son statut au Canada puisqu'elle disait être arrivée au pays vers 2008 avec un visa de visiteur.

Elle a affirmé être d'origine dominicaine et s'appeler Maria Altagracia Sena de Rodriguez.

Peu après, des policiers et des agents des services frontaliers canadiens ont comparé la photo de Mme Sena de Rodriguez à celle de la fameuse Nancy.

Ils disent avoir remarqué une ressemblance frappante. Des vérifications ont été faites avec les autorités italiennes, qui étaient alors convaincues de tenir enfin leur suspecte.

La femme a accouché le 3 novembre dernier à Montréal. Deux semaines plus tard, elle a été arrêtée à son tour pendant qu'elle se rendait à la prison de Bordeaux avec son bébé, pour visiter son conjoint.

«Solides preuves»

Dans des documents déposés au tribunal, la GRC affirme que la dame n'a plus de statut légal au Canada, qu'elle a fait usage de multiples identités et de passeports contrefaits.

La requête d'extradition de l'Italie n'a pas tardé.

Dans le document obtenu par La Presse, le procureur de la Couronne italienne dit détenir de «solides preuves de la culpabilité de Mme Castellano Rubio relativement au trafic international de drogue».

Il détaille l'écoute électronique et la filature qui ont lié la suspecte à un groupe criminel impliqué dans «le trafic de cocaïne à grande échelle entre des pays d'Amérique du Sud et d'Europe.

La suspecte, actuellement détenue à la prison Tanguay, a déjà annoncé son intention de contester son extradition vers l'Italie. La Cour supérieure devrait entendre sa cause demain à Montréal.