Michel Surprenant est sorti ébranlé de l'enquête publique sur la mort de sa fille Julie. L'homme, qui se bat depuis 12 ans pour savoir ce qui est arrivé, a maintenant deux certitudes: les obstacles se dressent les uns après les autres quand on cherche la vérité, et il ne sera jamais sûr à 100% que Richard Bouillon est le meurtrier de sa fille.

«Ça ne sera jamais une certitude à 100%, mais je dirais qu'à 95%, aujourd'hui, c'est lui», a dit M.Surprenant, en sortant de la salle d'audience.

Julie Surprenant, 16 ans, a été vue la dernière fois le soir du 16 novembre 1999, au moment où elle descendait d'un bus pour regagner le domicile de son père, à Terrebonne. Bien que son corps n'ait jamais été retrouvé, elle est considérée comme morte. Le principal suspect depuis le début, Richard Bouillon, agresseur sexuel à la longue feuille de route, habitait le même immeuble qu'elle. Évidemment, M.Surprenant l'ignorait. «Si je l'avais su, j'aurais cassé le bail», a-t-il lancé hier, au cours de son témoignage devant la coroner Catherine Rudel-Tessier.

Dans le néant

S'il y a eu une enquête du coroner, au cours des deux derniers jours, c'est que Bouillon, après avoir nié pendant des années qu'il était le meurtrier de Julie Surprenant, a admis sa responsabilité sur son lit de mort, en juin 2006. Mais ces aveux faits à deux employées de l'hôpital sont restés dans le néant, car celles-ci n'ont pas alerté la police. Ce n'est qu'en janvier 2011 qu'une d'entre elles a décidé de se manifester. Non pas à la police, mais à Claude Poirier, parce que Bouillon, en faisant ses aveux cinq ans plus tôt, avait dit vouloir parler à M. Poirier.

Michel Surprenant a évidemment été mis au courant, et il était anxieux d'en savoir plus, mais une infirmière-chef de l'hôpital a invoqué le «secret professionnel» pour protéger les confidences du meurtrier avoué.

M.Surprenant n'en revient toujours pas. D'autant plus qu'en 2006, après avoir été avisé que Bouillon se mourait à l'hôpital, il a voulu se rendre à son chevet dans l'espoir d'obtenir des aveux. M.Surprenant a reçu un non catégorique du responsable du dossier à la Sûreté du Québec (SQ), Roberto Bergeron.

«En étant sur le lit de mort, en fin de parcours, les contraintes juridiques qui vont encadrer la prise de renseignements, pour moi, ça ne comptait plus. Et je me disais que Bouillon, dans l'état où il était, je suis certain qu'il m'aurait parlé. Et on m'a refusé ça. Ça m'a extrêmement contrarié», a expliqué M.Surprenant, hier.

Passé criminel

Michel Surprenant a connu d'autres obstacles. En 2000, il a tenté de prendre connaissance du passé criminel de Richard Bouillon dans le plumitif. Mais il n'a pas réussi, car il ne connaissait pas sa date de naissance (la SQ avait refusé de la lui donner), l'utilisation du plumitif était compliquée et le préposé au palais de justice n'avait pas le temps de l'aider.

«Je vois que notre système n'est vraiment pas axé sur les victimes. Il y a énormément de travail à faire, c'est un combat qui ne sera jamais terminé. Tout citoyen qui est témoin d'un crime a l'obligation de le dénoncer, alors que les ordres professionnels, c'est des embûches, des embûches... Ça n'a pas de sens», a conclu M.Surprenant.