Saint-Romain est sous le choc. Vendredi soir, les corps d'une grand-mère et de ses deux petites-filles ont été retrouvés dans une résidence de cette petite bourgade estrienne. Le fils de la dame a été arrêté sur les lieux. Pascal Morin, 35 ans, a été accusé samedi après-midi de trois meurtres prémédités.

Ce sont les policiers de la Sûreté du Québec qui, après avoir reçu un appel téléphonique, ont fait la sombre découverte vers 18 heures vendredi soir. À l'intérieur d'une résidence située au 150, route Dostie, gisaient les corps d'une dame de 70 ans, Ginette Roy Morin, et de deux fillettes, Juliette Fillion, 8 ans, et sa soeur Laurence, 11 ans. Les deux jeunes victimes étaient également les petites-filles, du côté paternel, du maire de Saint-Romain, Jean-Luc Fillion. Située à environ 65 kilomètres au sud de Thetford Mines, Saint-Romain est une municipalité d'un peu plus de 600 habitants. Un village du genre de ceux où tout le monde se connaît. «Tout le monde est en état de choc ici», a indiqué, le trémolo dans la voix, Élise Lapierre, une collègue de travail de la mère des fillettes.

Les corps des trois victimes ont été sortis de la maison en début d'après-midi samedi. Ils seront amenés au laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale à Montréal pour y subir une autopsie qui permettra de déterminer les causes exactes du décès. La porte-parole de la Sûreté du Québec, Martine Asselin, a confirmé qu'aucune arme à feu n'avait été utilisée. Les enquêteurs des crimes contre la personne de la SQ et les techniciens en scène de crime étaient toujours sur place en fin de journée samedi.

Le fils de Ginette Roy Morin, soit l'oncle des petites filles, a été interpellé par les policiers sur les lieux du drame. Atteint de trouble bipolaire, Pascal Morin habitait avec sa mère, une enseignante au primaire à la retraite, veuve depuis quelques années. Il a comparu samedi par voie téléphonique.

La mère des fillettes était en vacances au Mexique avec des collègues de travail du Centre hospitalier de Lac-Mégantic. Les premières vacances qu'elle prenait à l'extérieur du pays. Son conjoint, le père des victimes, était demeuré à Saint-Romain pour s'occuper de sa ferme. C'est lui qui l'a jointe au téléphone, pendant la nuit, pour lui apprendre la triste nouvelle. Montée à bord d'un avion samedi matin, elle est attendue à Saint-Romain en soirée. Le couple a aussi deux autres filles, plus jeunes.



Courtoisie

Juliette Fillion, 8 ans, et sa soeur Laurence, 11 ans.

Vendredi était un congé scolaire pour les écoliers de l'école des Sommets, l'établissement que fréquentaient les fillettes dans le village voisin de Saint-Sébastien. Juliette et Laurence Fillion ont passé la journée chez leur grand-mère. Leur père serait complètement abasourdi par la tragédie. Il s'était entretenu avec ses filles au téléphone vendredi après-midi. Elles lui avaient alors demandé de rester souper «chez mamie». Il devait aller les chercher en soirée.

«On ne sait pas si elles ont souffert»



«On le voit souffrir et c'est comme si ça nous était arrivé à nous directement», a confié à La Presse Jean-Luc Fillion, le grand-père des jeunes victimes, à propos de la douleur de son fils. M. Fillion note qu'à la peine de la perte de ses deux petites-filles s'ajoute celle de ne pas connaître les circonstances du drame. «Ce n'est pas comme un accident de voiture. On ne sait pas comment ça s'est passé. On ne sait pas si elles ont souffert. On ne sait pas dans quel état elles sont. Peut-être qu'ils ne voudront pas qu'on les voie. On est dans l'ignorance.»

Jean-Luc Fillion n'aurait jamais cru que Pascal Morin puisse s'en prendre aux enfants. Il était le parrain de Laurence et était, selon M. Fillion, attentionné envers la fillette. «Il aimait beaucoup la petite fille», a-t-il noté. Jean-Luc Fillion a ajouté que Pascal Morin avait aussi une bonne relation avec sa mère et son père, décédé il y a quelques années. «Ils l'ont gâté et ils l'aimaient, s'est-il rappelé. Ils en ont pris soin comme il faut. On ne saura jamais ce qui s'est passé.»

Au village, plusieurs se disent surpris du geste que Pascal Morin a posé. Il n'était pas connu comme un homme agressif. Selon son voisin et ami d'enfance, Alain Isabel, Pascal Morin était aux prises avec un problème de consommation de drogue. «La vie s'est déroulée autrement pour lui, a déploré Alain Isabel. Mais, on ne pouvait pas s'attendre à ce que quelque chose d'aussi grave arrive. Il n'a jamais été violent par le passé.»

Photo Ronald Martel, La Tribune

Jean-Luc Fillion, grand-père des fillettes tuées et maire de Saint-Romain.

Le village voisin de Saint-Sébastien portait également le voile du deuil samedi. Proche de la famille Fillion, la mairesse de la municipalité, Marie-Douce Morin, a ouvert la salle du conseil, à l'hôtel de ville, pour permettre aux citoyens de se rassembler et de soutenir, à leur façon, la famille des victimes. Des enfants, qui ont connu Juliette et Laurence, fabriquaient des cartes d'adieu. «Quand j'ai appris la nouvelle, les jambes m'ont lâché, a réagi Mme Morin. On venait de m'arracher une partie du coeur.» Marie-Douce Morin connaissait bien les fillettes. «C'étaient des filles enjouées, de bonne humeur, intelligentes, a-t-elle souligné. Elles faisaient du patinage artistique et excellaient dans leur discipline.»

Une équipe de psychologues sera présente à l'école des Sommets lundi matin, a fait savoir la Commission scolaire des Hauts-Cantons (CSHC). «On a besoin de cette équipe pour soutenir les enfants et les membres du personnel qui sont tous très secoués et qui vont devoir traverser cette épreuve avec les élèves», a déclaré le directeur de cette petite école de 48 élèves, Marcel Boulanger. «Nous avons connu des accidents de la route, des suicides, mais c'est la première fois que nous sommes confrontés à un drame de cette nature-là», a indiqué le directeur de la CSHC, Bernard Lacroix.

Photo: Maxime Picard, La Tribune

Ce sont les policiers de la Sûreté du Québec qui ont fait la sombre découverte vers 18 heures vendredi soir.