Un citoyen de Terrebonne à qui une entreprise réclamait de l'argent poursuit en justice un huissier qui l'aurait obligé à emprunter 10 000 $ à un prêteur usuraire. Un an plus tard, deux fiers-à-bras l'ont battu devant sa femme et ses enfants parce que, affirme-t-il, il n'avait pas remboursé le prêteur.

Michel Paré, 44 ans, réclame 185 000$ pour dommages moraux, diffamation, menaces, séquelles physiques et intimidation à l'huissier Jacques Bouthillier et à sa firme, Paquette et Associés.

La cause n'a pas été entendue et les allégations ne sont pas prouvées. M. Bouthillier a refusé de commenter la poursuite. Il a cependant signalé à La Presse que M. Paré a déjà été condamné pour fraude et que, par conséquent, il ne jouit pas d'une bonne crédibilité.

«C'est vrai que j'ai un dossier de fraude, a reconnu M. Paré. Mais j'ai aussi toutes les preuves de ce que j'avance dans ma poursuite, notamment des enregistrements d'entretiens avec M. Bouthillier.»

M. Paré, qui se définit comme «responsable des comptes recevables», a porté plainte au syndic de la Chambre des huissiers de justice. «Le syndic a en effet été saisi du dossier, a dit Louis-Raymond Maranda, PDG de cet ordre professionnel. Pour cette raison, et parce que le processus est pendant devant les tribunaux, je ne peux faire aucun commentaire.»

Selon la poursuite, M. Bouthillier s'est présenté une première fois à la maison de M. Paré à Terrebonne, le 19 septembre 2008 à 18h, pour procéder à une saisie avant jugement. M. Paré devait environ 10 000 $ à une entreprise de construction pour laquelle il avait déjà travaillé. Dans un tel cas, la loi prévoit qu'il est possible d'éviter la saisie en payant une caution.

Mais c'était un vendredi soir et les banques étaient fermées. M. Paré affirme que M. Bouthillier lui a alors dit qu'il connaissait quelqu'un qui pouvait lui prêter 10 000 $. Une rencontre aurait été organisée devant une station d'essence. Le prêteur aurait remis 10 000 $ en coupures de 20 $ à M. Bouthillier.

Toujours selon la poursuite, M. Bouthillier aurait dit à M. Paré qu'il devait désormais cette somme à ce prêteur, à un taux d'intérêt de 10% par semaine. M. Paré ne l'a pas remboursé.

Un an plus tard, deux fiers-à-bras se sont présentés chez lui et lui ont réclamé 80 000 $. Ils l'ont battu devant sa femme et ses enfants, assez gravement pour lui casser le nez et provoquer une commotion cérébrale. Sa fille a composé le 911. Policiers et ambulanciers sont arrivés sur les lieux.

Le téléphone a sonné. Un policier a répondu. Pensant qu'il parlait à M. Paré, un des agresseurs a menacé de mettre le feu à la maison s'il ne payait pas. Cet agresseur a été arrêté et accusé.

La Presse a pu joindre le prêteur usuraire. Au cours d'un bref entretien au téléphone, il a dit qu'il avait effectivement prêté 10 000 $ à M. Paré à la demande de M. Bouthillier. Il n'a pas précisé pourquoi il avait prêté une somme aussi importante à un homme qu'il ne connaissait pas, mais il a dit que M. Bouthillier est son oncle. Il a dit qu'il n'avait rien à voir avec l'agression.

L'automne dernier, M. Bouthillier se serait présenté une deuxième fois au domicile de M. Paré pour procéder à une saisie avant jugement. Il lui aurait alors dit: «Ce soir, je vide tout. La dernière fois, tu n'as pas payé. Qui penses-tu qui doit rembourser [le prêteur usuraire]? C'est moi!»

Le prêteur se serait rendu à son tour chez M. Paré et lui aurait dit que des fiers-à-bras pourraient revenir le battre s'il ne payait pas sa dette, affirme la poursuite. Le prêteur en question nie cette information. Quoi qu'il en soit, M. Paré affirme vivre désormais dans la peur. Il a fait installer des caméras de surveillance et embauché une firme de sécurité.

La firme d'huissiers Paquette et Associés, mise en cause dans la poursuite, n'a pas voulu faire de commentaire. Son PDG, Charles Paquette, a dit que la compagnie d'assurances de la firme faisait enquête.