Le 16 septembre 2010, la petite Megann Ayotte Lefort, 6 ans, est morte à son école d'un épisode allergique-asthmatique. Un an plus tard, ses proches ne décolèrent pas. Selon son oncle et son père, les intervenantes du service de garde ont attendu près d'une heure avant de joindre les parents et d'appeler l'ambulance, alors qu'elles voyaient que l'état de la petite dégénérait. Une situation qu'ils jugent inacceptable.

«Des enfants qui font de l'asthme et qui ont des allergies, il y en a plein dans les écoles du Québec. On ne peut pas accepter que les intervenants ne sachent pas comment agir dans ces cas-là!», affirme l'oncle de Megann, Stéphane Lefort.

Asthmatique et allergique aux produits laitiers depuis sa naissance, la petite Megann venait de commencer sa première année à l'école Sainte-Germaine-Cousin, à Pointe-aux-Trembles. L'établissement, qu'elle fréquentait depuis la maternelle, connaissait bien son dossier de santé.

La soirée fatale

Le soir du 16 septembre 2010, le père et la mère de Megann, qui sont séparés, se rendent à la rencontre de parents. Vers 18h15, leur fille est confiée au service de garde qui devait s'occuper de 25 enfants pendant la rencontre. L'une des deux intervenantes sur place fait alors remarquer à la mère que la fillette présente des plaques rouges sur le corps.

La mère ne s'en formalise pas en disant que cette situation se produit parfois et part pour la réunion. Cinq minutes après, Megann pleure et demande à voir son père. Ne pouvant calmer son chagrin, Megann s'installe devant un film avec les autres enfants. Mais elle a du mal à respirer. Elle pleure beaucoup et dit s'ennuyer de sa mère. Vers 18h40, les éducatrices demandent à Megann de prendre ses pompes pour l'asthme, ce que fait la petite.

L'état de Megann ne s'améliore pas. Vers 19h, les intervenantes l'amènent dans une pièce à part pour la calmer. «Je lui flattais le dos. Elle pleurait tout le temps», a dit l'une des intervenantes à la police. Cette dernière reconnaît que «ce n'est pas dans les habitudes» de la petite de pleurer ainsi.

Vers 19h05, Megann a toujours du mal à respirer. Une intervenante part finalement chercher les parents. Elle s'arrête en chemin pour informer la directrice. La femme qui reste aux côtés de Megann note que les yeux de l'enfant «allaient dans le vide».

«Pendant tout ce temps, Megann n'allait pas bien. Mais personne n'a appelé le 911! Et personne n'a cru bon d'alerter les parents avant 19h05!», déplore Stéphane Lefort.

L'intervenante revient avec la mère entre 19h10 et 19h20, selon les versions. Dans son témoignage à la police, l'intervenante dit que dès son arrivée, la mère «a pris sa fille par le visage et a dit d'appeler le «911 tout de suite». L'intervenante s'exécute.

Panne des insufflateurs

Les pompiers arrivent en premier et tentent d'utiliser des insufflateurs. Mais les trois appareils destinés aux enfants sont défectueux. Les ambulanciers arrivent tout de suite après et voient l'enfant inconsciente, blanche, les lèvres bleues, dans les bras d'un pompier. Des manoeuvres de réanimation sont tentées. La petite a été transportée à l'hôpital Maisonneuve-Rosemont, où son décès a été constaté.

À la suite des événements, une enquête du coroner a été ouverte. Dans son rapport publié en août, la coroner Hélène Lord conclut qu'il est difficile de dire si Megann est morte d'une crise d'asthme ou d'un choc anaphylactique. Elle note que les versions des différents acteurs diffèrent. Elle ne fait qu'une seule recommandation: qu'un suivi soit fait au service d'incendie de Montréal pour s'assurer que les insufflateurs fonctionnent en tout temps.

Cette conclusion irrite Stéphane Lefort. «Il n'y a aucun mot pour l'école. Pourquoi? demande-t-il. Le rapport a été bâclé. Si on ne veut pas qu'une telle situation se reproduise dans une autre école, il faut faire des recommandations.» Le père de Megann, Sylvain Lefort, est du même avis. «Il y a eu beaucoup de manquements à l'école. Ma fille demandait de l'aide. On l'a laissée mourir», dénonce-t-il. L'oncle a déposé une contestation au Bureau du coroner, mardi.

L'école non responsable

À la commission scolaire de la Pointe-de-l'Île, dont fait partie l'école Sainte-Germaine-Cousin, on assure que «l'école est étrangère à ce décès». La porte-parole de la commission scolaire, Christiane St-Onge, indique que le rapport du coroner est clair: l'école n'a rien à se reprocher. Mme St-Onge déplore que la famille de Megann ait lancé une campagne sur les réseaux sociaux pour «tenter de faire une mauvaise réputation à l'école». «On comprend leur désarroi. Mais l'école n'a rien à voir là-dedans», soutient-elle.

Mais un an après la mort de Megann, son père éprouve beaucoup de rancoeur envers l'établissement. Il peine à se remettre des événements. «J'ai perdu 20 livres. J'ai perdu mon emploi. J'ai perdu mon condo. Je suis sur le point de perdre mon auto... souffle-t-il. J'ai vu ma fille mourir... J'ai encore le goût d'aller la rejoindre des fois.»