Ses cheveux teints en blond ne trompent plus personne, et les faux noms qu'elle a utilisés pendant trois ans ne lui sont plus d'aucune utilité. Démasquée et arrêtée à Montréal le 16 septembre dernier, Helen Gavaghan ne conteste pas son extradition vers la Grande-Bretagne, où elle doit être jugée pour avoir enlevé sa propre fille.

Vendredi, en Cour supérieure, la femme de 34 ans, qui est détenue depuis son arrestation, s'est empressée de signer les documents de son extradition tout en jetant des regards amènes à une vingtaine d'amis dans la salle d'audience. Si Mme Gavaghan, mince et naturellement brune, veut partir si vite, c'est que sa fille, Pearl Rose, maintenant âgée de 7 ans, est repartie lundi dernier en Angleterre. Elle a retrouvé son père, Henry de Massa, qu'elle n'avait pas vu depuis le 1er décembre 2008.

Ce matin-là, M. de Massa avait conduit l'enfant à la garderie, à Withington, au Royaume-Uni. Mme Gavaghan est allée la chercher en après-midi. Jusque-là, tout était normal puisque le couple, qui était séparé, avait la garde partagée. Mais voilà, l'enfant n'a jamais reparu ni à la garderie ni chez son père.

Inde et Mexique

Mme Gavaghan a d'abord fait croire qu'elle était partie en vacances en Inde avec l'enfant et qu'elle reviendrait après Noël. En fait, le 30 décembre, elle est entrée au Mexique sous le nom de «Meta International».

Elle est passée ensuite par les États-Unis avant de s'établir à Toronto, où elle a adopté le nom de Dana Flaherty. Elle prétendait que sa fille s'appelait Belle. De septembre 2009 à mars 2010, la femme et l'enfant ont été vues dans un organisme qui distribuait des repas gratuits. Elle a aussi vécu rue Close, où les membres d'un mouvement religieux lui sont venus en aide.

Pendant ce temps, le père cherchait désespérément sa fille et a même eu recours à un détective privé. Informé que la petite pouvait se trouver à Toronto, il s'y est rendu lui-même.

La mère et l'enfant ont fui de nouveau. Elles sont venues s'établir à Montréal, dans Parc-Extension, selon les nombreuses personnes présentes, vendredi, qui disaient être des voisins.

Une secte

Le père a toujours pensé que Mme Gavaghan avait tenté de se joindre à une secte. D'ailleurs, ils se querellaient sur la façon d'élever l'enfant. Attirée par la marginalité, la mère refusait que la fillette reçoive des vaccins et qu'elle aille à l'école. Elle voulait l'instruire elle-même.

À Montréal, c'est d'ailleurs ce qu'a fait Mme Gavaghan, qui avait cette fois adopté le nom de Eve Hart. L'enfant, elle, s'appelait désormais Krista.

Pour vivre, Mme Gavaghan faisait des ménages. C'est ce qu'a indiqué Andrea Berverly, qui s'est rendue au palais de justice, vendredi, avec son bébé de deux mois et demi, pour appuyer son amie.

Le 16 septembre dernier, dans la soirée, Mme Gavaghan et sa fille ont été arrêtées à deux pas de leur domicile. Un citoyen, intrigué par l'attitude bizarre de la femme avec l'enfant, avait appelé le 911. Incapable de prouver son identité, Mme Gavaghan a été arrêtée, et le pot aux roses a été découvert. Elle a alors revendiqué le statut de réfugiée. Elle soutient qu'elle a fui parce que son mari était autoritaire et qu'il abusait sexuellement et psychologiquement de leur fille.

Les gens venus appuyer Mme Gavaghan vendredi sont persuadés qu'elle dit vrai, même s'ils ne la connaissent que depuis un an et demi et qu'ils n'ont pas vraiment la version du père. Ils soutiennent qu'elle est extraordinaire avec sa fille.

Le père

M. de Massa, que La Presse a joint en Angleterre vendredi, est fou de joie d'avoir retrouvé sa fille après tout ce temps. Les retrouvailles se passent très bien, dit-il, mais il faut être patient pour certains aspects, car la petite est un peu désorientée, notamment au sujet de son nom.

«Il faut qu'elle s'adapte. Ce n'est qu'aujourd'hui que j'ai pu l'appeler Pearl», a-t-il dit. L'enfant pensait qu'elle n'avait pas de père. Les retrouvailles se sont faites graduellement.

Le processus a été solidement encadré par des experts au Canada, et cela se poursuit en Angleterre. L'enfant n'est jamais allée à l'école, et M. de Massa a commencé à en discuter avec elle. Par ailleurs, il n'est pas étonné des «mensonges» véhiculés par son ex-conjointe à son sujet. Il les a entendus auparavant.