Même s'il trouve que son ex-conjointe est faite forte et qu'elle ne se laisserait certainement pas impressionner par lui, Jean-Yves Migneault ne pourra la contre-interroger lui-même pour étayer sa défense. C'est ce que la juge Lori Weitzman a annoncé à l'accusé Migneault, lundi, en Cour du Québec.

M. Migneault, 57 ans, est accusé d'avoir enlevé une femme de 44 ans, qu'il ne connaissait pas, dans le stationnement d'un IGA du quartier Villeray, le 11 avril 2010. Il aurait forcé la femme à le conduire à Saint-Lin, l'aurait séquestrée, volée, terrorisée et agressée sexuellement, avant de la ramener à Montréal en fin de soirée. Il est aussi accusé d'avoir harcelé et menacé son ex-conjointe avec une fausse arme à feu, un peu avant ce 11 avril 2010.

M. Migneault, qui a passé une vingtaine d'années de sa vie en prison, notamment pour des délits sexuels et de violence, a commencé à subir son procès en mai dernier. Pendant une semaine, la procureure de la Couronne Rachelle Pitre a fait défiler les témoins, dont les deux victimes alléguées. Après, M. Migneault, qui était représenté par Me Yann Trignac, a témoigné pour sa défense. Mais voilà que le 12 juillet dernier, l'accusé a remercié son avocat, désirant dorénavant se représenter seul. Et la première chose qu'il a demandée est de rappeler son ex-conjointe à la barre pour la contre-interroger lui-même.

Me Pitre s'y est opposée formellement dans une requête qu'elle a plaidée, lundi. La femme de 55 ans serait grandement indisposée à être contre-interrogée par son harceleur allégué, a fait valoir Me Pitre. La procureure ne s'oppose pas à ce que la femme revienne à la barre, mais ce nouveau contre-interrogatoire devrait être mené par un avocat, a soutenu Me Pitre.

M. Migneault a pour sa part indiqué qu'il voulait ramener son ex-conjointe à la barre pour que la «vraie vérité» sorte. «Elle a un caractère très fort, et elle a étudié beaucoup en psychologie. C'est pas Jean-Yves Migneault qui va l'impressionner», a lancé l'accusé.

Au terme de la brève audience, la juge Weitzman a conclu que le contre-interrogatoire se ferait par le truchement d'un avocat. Et cet avocat, ce sera Me Trignac, choix qui convient à l'accusé. Me Trignac pourrait rester au dossier comme ami de la Cour par la suite, même si M. Migneault compte toujours se représenter seul. La suite du procès aura lieu le 9 novembre.

Rappel des événements

Signalons enfin que l'ex-conjointe, qu'on ne peut nommer que par les initiales L.L, a connu M. Migneault en août 2009, en répondant à une annonce qu'il avait fait paraître dans le courrier de rencontre de la revue Bel Âge. Mme L.L a fréquenté M. Migneaut deux mois avant de rompre. L'homme a réussi à la reconquérir en lui faisant croire qu'il avait le cancer du foie et qu'il n'en avait plus pour longtemps à vivre. Mme L.L. a toutefois mis fin pour de bon à leur relation en mars 2010. M. Migneault ne l'aurait pas accepté et aurait rôdé autour de chez elle. Le 11 avril, en après-midi, M. Migneault aurait accosté L.L. alors qu'elle arrivait près de chez elle. Ils ont marché un moment et bu un café. Elle lui a expliqué que c'était bien fini. En la menaçant d'une arme (qui était fausse en réalité), il lui aurait ordonné de l'accompagner chez elle en la menaçant de la tuer si elle n'obéissait pas.

«Tue-moi», lui aurait-elle répondu. Déstabilisé par cette réponse ainsi que par le passage d'une voiture, M. Migneault se serait enfui. Vers 20 h 30, à deux kilomètres de là, il aurait enlevé l'autre victime alléguée, dans le stationnement du magasin IGA, situé à l'angle de l'avenue Christophe-Colomb et de la rue Jarry. L'accusé soutient ne pas se souvenir de grand-chose au sujet de l'enlèvement, et prétend avoir peut-être été drogué à son insu par son ex-conjointe.