L'Ordre des administrateurs agréés, chargé de s'assurer que les administrateurs respectent les principes de saine gestion au Québec, est poursuivi par son ancien syndic, qui accuse ses dirigeants de l'avoir harcelé psychologiquement pendant des années et de s'être ingérés dans ses dossiers d'une façon inacceptable.

Guy Vauban, qui a démissionné en février après 13 ans au poste de syndic, réclame maintenant 138 000$ à son ancien employeur.

Dans sa poursuite intentée en Cour supérieure, il prétend que la directrice générale, Denise Brosseau, l'a fait souffrir pendant des années «en l'ignorant, en l'isolant [...] en ne l'invitant plus à participer à certaines réunions d'équipe, en ne le consultant plus pour divers conseils». Elle aurait aussi demandé à d'autres employés de ne plus lui adresser la parole sauf pour des cas liés exclusivement à ses dossiers de syndic. Il dit aussi avoir été victime d'une tentative de destitution injustifiée après avoir ouvert une enquête interne.

La mission de protection du public de l'Ordre est reconnue légalement. Son syndic a pour mission d'enquêter sur tout manquement commis par des membres.

Or, Denise Brosseau est elle-même administratrice agréée.

M. Vauban prétend qu'elle a agi de façon «cavalière» à son endroit, «de manière à l'humilier et à nuire à sa réputation». Elle aurait par exemple mis en doute la pertinence de certaines de ses dépenses et de sa participation à d'importantes réunions. D'autres membres de la direction auraient ensuite commencé à avoir une attitude désobligeante à son égard.

L'ex-syndic dit aussi avoir été l'objet d'une enquête du conseil d'administration de l'Ordre parce qu'on lui reprochait d'avoir appuyé la candidature de l'une de ses connaissances à un poste au conseil. Cette enquête est à ses yeux «un acte inutile, vexatoire et un abus de pouvoir destiné à l'humilier».

Enquêteur externe

Il ajoute que, en juillet 2009, certaines employées de l'Ordre auraient communiqué avec lui, en sa qualité de syndic, pour se plaindre de «situations qui s'apparentaient à du harcèlement psychologique» au travail. M. Vauban affirme qu'un enquêteur externe a été nommé pour faire la lumière sur cette situation, mais que ce dernier a été remercié de ses services avant la fin de son mandat.

Le syndic aurait alors ouvert une enquête interne sur l'affaire. Peu après, il aurait reçu par huissier une lettre l'avisant que le conseil d'administration tiendrait un vote sur sa destitution. La majorité des membres ont voté pour le destituer, mais comme il fallait une majorité des deux tiers, M. Vauban a été maintenu dans ses fonctions.

Estimant que ce geste constituait «une ingérence inacceptable dans les affaires du syndic» et remettait «dangereusement en question le principe de l'indépendance de la fonction de syndic d'un ordre professionnel», M. Vauban a quitté son emploi peu après. Il se dit toutefois victime d'un «congédiement déguisé».

L'ex-syndic n'a pas souhaité commenter sa poursuite, mais son avocat, Me Richard Legault, assure qu'on a tenté de l'écarter de son poste sans raison valable. «Les motifs n'étaient absolument pas sérieux. J'ai été très surpris, car c'était un ramassis d'événements tout à fait insuffisants pour justifier une tentative de destitution», a-t-il dit, sans vouloir donner plus de détails sur les fautes qu'aurait pu commettre son client.

Du côté de l'Ordre des administrateurs, l'avocat Francis Gervais assure que le processus de destitution a été mené dans le respect des règles. Il réserve ses commentaires quant aux autres allégations. «Sans toutefois rien dévoiler, soyez assuré que les allégués de la demande seront vigoureusement contestés», dit-il.