Un sans-abri et un passant qui se trouvait au mauvais endroit au mauvais moment ont perdu la vie, mardi, sous les balles d'agents de la police de Montréal (SPVM). Selon les premiers éléments divulgués dans cette affaire, il semble que le sans-abri ait menacé les agents avec un couteau. La question qui était sur toutes les lèvres hier: les policiers n'auraient-ils pas pu faire autrement? Éviter de tirer, ou tirer dans les jambes?

Un commandant à la retraite qui a demandé l'anonymat signale que ce n'est pas la consigne. «Quand tu sors ton arme, c'est pour protéger ta vie. Tu tires pour tuer, pas pour blesser, et tu vises le cou, le thorax - la ceinture et le cou.»

Cela dit, poursuit-il, dans ces cas-là, il faut toujours s'assurer que personne d'autre ne se trouve dans le champ de tir. Dans ce cas, même si la vie du policier est en danger, il ne doit pas tirer. «Il doit alors courir dans l'autre direction, se cacher derrière une auto et, quand plus personne ne se trouve dans le champ de tir, là, le policier peut tirer.»

Ça, c'est la théorie. «Dans le feu de l'action, tout peut arriver.»

Selon Alfredo Munoz, ancien sergent du SPVM et spécialiste en matière d'emploi de la force, la règle générale, enseignée à l'École nationale de police, veut qu'un policier tire lorsqu'un suspect armé qui fonce sur lui se trouve à une distance de 21 pieds. «La possibilité de tirer dans les membres inférieurs a plusieurs aspects qui, à mon avis, sont irréalistes, voire dangereux. Si l'individu se déplace rapidement, la cible devient difficile à atteindre et le danger pour le policier ou le citoyen augmente», explique-t-il.

Et le gaz poivre? «Oubliez cela. Quand quelqu'un est en crise, le gaz poivre ne parvient pas à le maîtriser», explique le commandant à la retraite.

Le pistolet électrique

Du temps où il était policier, il se souvient de s'être trouvé dans une situation semblable, devant un homme menaçant armé d'un couteau. «Dans le temps, nous avions dans le coffre de l'auto des bâtons de métal longs de 6 pieds - ça ressemblait à une matraque. Avec cela, on pouvait tenir quelqu'un à distance... De nos jours, les policiers sont tellement peu équipés! Ils ne peuvent que tirer, d'autant plus qu'on leur interdit le Taser.»

À son avis, le pistolet électrique («Taser») aurait pu éviter le drame de cette semaine, mais il reconnaît qu'il ne faut certainement pas en abuser et que, dans le cas d'une personne qui aurait consommé de la drogue ou de l'alcool, cela peut entraîner des problèmes cardiaques.

Alfredo Munoz explique que le pistolet électrique peut être un outil intéressant dans ce type de situation «s'il est disponible et qu'on a la formation pour l'utiliser... cependant, si c'est une situation d'urgence et qu'on ne l'a pas, il faut s'en passer».

Selon nos sources, les policiers du SPVM sont très largement favorables à l'utilisation du pistolet électrique. Pour l'instant, seuls les membres du groupe tactique d'intervention, ceux du groupe d'intervention et le personnel des centres de détention de la police de Montréal peuvent y recourir. «On pense que ça pourrait sauver des vies, a expliqué une source policière qui a demandé l'anonymat. Le hic, c'est que le pistolet électrique a une image controversée dans le public. Les politiciens sont donc trop frileux pour en donner aux patrouilleurs.»