C'est une col bleu de la Ville de Montréal qui a découvert le cadavre de Natasha Cournoyer, le 6 octobre 2009, pendant sa pause repas avec un collègue, au bord du fleuve, à Pointe-aux-Trembles.

Elle s'était retirée derrière un buisson pour uriner. «C'est là qu'elle a vu un pied et s'est mise à crier en panique en disant qu'elle avait vu une morte, a relaté hier Tony Moreau, réparateur de bornes d'incendie. Je lui disais qu'elle était folle, mais elle est tombée sans connaissance deux fois: la deuxième fois, en pleine face, comme une poche de patates, sans aucune retenue. J'ai compris que c'était vrai.»

M. Moreau a rendu ce témoignage au procès pour meurtre de Claude Larouche, 49 ans, soupçonné d'avoir enlevé, violé et tué Mme Cournoyer. La fonctionnaire de 37 ans a disparu le 1er octobre 2009 après avoir quitté son travail vers 20 h.

Selon le pompier Marc Parizeau, qui a lui aussi témoigné hier, du sang avait coulé des narines de la victime. Elle avait des rougeurs autour du cou et était un peu dévêtue.

Sur le chemin du tueur

Deux des six témoins entendus hier pensent par ailleurs avoir croisé la route du meurtrier. Quelques heures avant la découverte du cadavre dans un buisson, Tony Moreau avait déjeuné au même endroit. Le conducteur d'un camion Dodge Caravan s'était alors immobilisé devant lui et l'avait dévisagé avant d'aller se garer hors de sa vue et d'éteindre son moteur. «Le matin, j'ai pensé que c'était la Ville qui me surveillait, mais j'ai commencé à comprendre que ce n'était pas normal. Un gars de la Ville serait venu m'aborder.»

Après l'arrivée des policiers, M. Moreau leur a donc suggéré d'analyser des traces de pneus laissées dans l'herbe.

Une rencontre qui dérange

Un autre témoin, Sylvain Garon, a pour sa part raconté que, une heure avant la disparition de Natasha Cournoyer, il promenait le saint-bernard de son voisin dans les sentiers du bois qui jouxte le stationnement de la Place Laval, où la jeune femme a été vue pour la dernière fois. Alors que tombait la pénombre, il a croisé une joggeuse et a vu un homme surgir du bois, tout près d'elle. «J'ai eu l'impression de le déranger», a dit le témoin, qui a vu l'homme tourner les talons et le devancer d'un pas décidé sur le sentier, les mains dans les poches et la tête cachée par le capuchon de son chandail.

L'homme a ensuite disparu au détour du chemin. «Il était retourné dans le bois. J'ai eu une petite crainte, car je ne savais pas à qui j'avais affaire», a précisé M. Garon. Il a appelé la police après avoir appris la disparition de Mme Cournoyer.

Un amoureux qui refait surface

En matinée, Kristine Laflamme a raconté s'être effondrée en pleurant lorsque les policiers lui ont montré l'avis de disparition de sa meilleure amie. Alertée par le conjoint de Natasha Cournoyer, elle s'était déjà approchée à quelques pieds de sa Mazda3 et avait observé des marques sur les portières et dans le gravier «comme si quelqu'un avait essayé de se retenir pour ne pas tomber», a-t-elle dit.

La jeune femme s'est aussitôt enfoncée dans les bois, certaine d'y découvrir un cadavre. «Je ne pouvais pas laisser mon amie. Je n'étais pas capable de juste rester là sans rien faire», a-t-elle expliqué.

Elle a aussi raconté que Natasha Cournoyer s'apprêtait à tourner la page sur sa vieille relation, entre autres choses parce qu'elle avait appris qu'un de ses premiers amoureux était redevenu célibataire. La victime a aussi parlé de tout cela, ainsi que de sa fatigue, à un ami et ancien collègue d'Industries Canada, Adam Bentaleb, qu'elle a rappelé à Ottawa une demi-heure avant sa disparition.

«Elle avait hâte de retourner chez elle. Elle était fatiguée», a rapporté ce dernier en parlant d'une jeune femme ambitieuse, rigoureuse et sportive.

Le procès reprend à 9h30 demain avec la suite du témoignage d'André Tremblay, chimiste au Laboratoire de science judiciaire et de médecine légale. Celui-ci a comparé les résidus de plastique trouvés sur une paire de cisailles à 28 morceaux de cartes d'identité et de cartes bancaires.

Dans les jours suivant l'enlèvement, ces morceaux de cartes ont été trouvés en bordure de l'autoroute 19.