Fouilles dans le canal de Lachine, vérifications en Floride et au Vermont, destruction de trottoirs et de planchers; les enquêteurs ont fait des pieds et des mains pour retrouver Jolène Riendeau depuis sa disparition, en avril 1999.

«À l'époque et encore aujourd'hui, on a traité ce dossier-là comme on traiterait le meurtre d'un policier ou d'une tête dirigeante des motards; nous avons tout fait», a résumé hier André Bouchard, qui a été commandant de la Section des crimes majeurs de la police de Montréal de 2000 à 2004.

L'affaire n'a jamais été simple. Les policiers n'avaient pas de scène de crime, donc pas de preuves matérielles. Ils devaient donc se baser sur les renseignements transmis par le public.

Les enquêteurs ont d'abord fait le tour des proches de la fillette de 10 ans. Ses parents ont rapidement été exclus de la liste des suspects. À l'époque, les policiers avaient dans leur ligne de mire trois ou quatre bons suspects, dont un membre de l'entourage. Ils soupçonnaient aussi un résidant du secteur qui aurait déjà agressé sexuellement des enfants.

Dans les semaines qui ont suivi la disparition, une quinzaine d'enquêteurs ont été affectés exclusivement au dossier. Le quartier a été scruté à la loupe, tout comme le fond du canal de Lachine, situé à 400 m de la résidence des Riendeau. La police de Montréal a également demandé de l'aide aux autorités américaines pour faire des vérifications en Floride et au Vermont, selon l'ex-commandant Bouchard.

Les recherches ont repris de plus belle en 2002, cette fois dans le Vieux-Montréal. Un citoyen avait affirmé avoir vu une personne enterrer un sac en bordure d'un chantier de la rue Berri, à l'époque de la disparition de la fillette. «On avait enlevé le trottoir à cet endroit, se souvient André Bouchard. On a effectivement trouvé des ossements. On était sûrs que c'était Jolène, mais finalement, c'était les os d'un chien.»

En 2005, les enquêteurs ont fouillé à nouveau le fond du canal de Lachine. Un détenu avait confié à un compagnon de détention qu'il y avait jeté le corps de la fillette, à la hauteur de la taverne Magnan. Le niveau du canal a été abaissé pour faciliter les recherches, en vain.

Faux espoirs

Selon nos sources, en 2007, un renseignement du public a conduit les enquêteurs dans une entreprise située en bordure du canal de Lachine. Un citoyen leur avait dit que les restes de Jolène se trouvaient sous le plancher de béton, où ils auraient été déposés à l'époque où l'immeuble était en rénovation. Le plancher a été cassé, mais les recherches n'ont rien donné.

L'ex-commandant Bouchard estime qu'il est normal que les policiers divulguent peu de renseignements sur la découverte du corps. «Ils ne veulent pas nuire à l'enquête, explique-t-il. Actuellement, seuls la police et le meurtrier savent à quel endroit se trouve le corps.» La façon dont la police a annoncé la découverte du corps fait aussi partie de l'enquête, croit André Bouchard.

Le mois dernier, la mère de Jolène, Dolorès Soucy, a déploré le fait que les enquêteurs lui donnaient peu de nouvelles sur le dossier de sa fille. «Ils étaient sur une piste, mais ils ne voulaient pas nuire à leur enquête ou encore donner de faux espoirs à la famille», explique M.Bouchard, qui salue le travail des policiers.

Un travail qui, 12 ans plus tard, a finalement porté ses fruits.

La découverte pourrait remonter à plusieurs jours

La découverte du corps de Jolène Riendeau pourrait remonter à plusieurs jours, voire plusieurs semaines. Pour identifier la victime, les restes doivent être envoyés au laboratoire des sciences judiciaires et de médecine légale du Québec à Montréal, rue Parthenais. Si le dossier est prioritaire, son traitement peut prendre de deux à trois semaines. Les spécialistes peuvent aussi faire une analyse dentaire.

Chronologie

12 avril 1999

Vers 16h, Jolène Riendeau, 10 ans, quitte son domicile de la rue De Montmorency, à Pointe Saint-Charles, en disant à son père qu'elle allait s'amuser avec des amis en attendant le souper. Peu après, elle achète des croustilles dans un dépanneur de la rue Charlevoix.

13 avril 1999

Vers 1 h du matin, le père de Jolène Riendeau signale sa disparition après avoir appelé tous les amis et connaissances de sa fille. Les policiers entreprennent des recherches dans le quartier, le long du canal de Lachine et dans les gares de triage du secteur.

20 avril 1999

Des plongeurs de la police ratissent le fond boueux du canal de Lachine, situé à 400 m du domicile de la fillette.

23 avril 1999

Jeunesse au Soleil offre une récompense de 5000$ à toute personne qui fournira des renseignements susceptibles d'aider à retrouver Jolène Riendeau.

1er mai 1999

L'émission américaine America's Most Wanted diffuse la photo et la description de Jolène Riendeau.

Du 5 au 13 mai 2005

La police de Montréal entreprend de nouvelles recherches dans le canal de Lachine à la lumière d'une nouvelle information: un détenu a confié à un compagnon de détention qu'il avait tué l'enfant et jeté son corps dans le canal, à la hauteur de la taverne Magnan. On abaisse le niveau de l'eau pour faciliter les recherches à l'aide d'un échosondeur numérique et de caméras, en vain.

15 avril 2009

Les parents de Jolène Riendeau, qui sont restés ensemble malgré le drame, organisent une marche dans Pointe Saint-Charles pour souligner les 10 ans de la disparition de leur fille. Les marcheurs reconstituent le dernier trajet de Jolène avant sa disparition.

2 août 2010

Le réseau Enfant-Retour relance une campagne pour retrouver Jolène Riendeau. L'organisme diffuse un portrait qui montre de quoi aurait l'air la disparue à 22 ans.

11 avril 2011

La mère de Jolène, Dolorès Soucy, critique le travail des policiers dans le dossier dans une entrevue au journal 24h. Elle déplore le fait qu'elle reçoit peu de nouvelles de leur part.

4 mai 2011

La police de Montréal annonce qu'elle a retrouvé le corps de Jolène Riendeau, plus de 12 ans après sa disparition.