Une ex-prostituée accro au crack, dont l'enfant de 18 mois a été victime de négligence grave, vient d'écoper une peine clémente d'emprisonnement avec sursis.



Depuis les événements survenus en 2006, «l'accusée a radicalement changé son mode de vie», a indiqué la juge Louise Villemure de la Cour du Québec au moment du prononcé de la peine, mardi, au palais de justice de Montréal.

L'accusée qu'il nous est interdit d'identifier a plaidé coupable en octobre dernier à trois chefs d'accusation d'abandon d'enfant et de négligence criminelle.

Le 8 août 2006, un voisin a été alerté par les pleurs de l'enfant. Cet enfant était seul sur un balcon situé au rez-de-chaussée d'un immeuble. Il était blessé et sale. Les policiers ont découvert qu'il avait réussi à descendre seul du 4e étage au rez-de-chaussée un long escalier de métal. Pendant ce temps-là, la mère dormait profondément dans le salon.

L'enfant a été transporté d'urgence à l'hôpital Ste-Justine. La mère a refusé de s'y rendre. L'enfant avait des traces de brûlures anciennes et récentes, manifestement infligées par un élément de cuisinière. Certaines étaient profondes et infectées. L'infirmière a noté au dossier : «patient trop sale, bonbons et déchets plastiques et terre dans les cheveux, corps souillé de terre, vêtements empestent selle et urine».

L'enfant de 18 mois a dû recevoir de la morphine à l'hôpital tellement la douleur causée par les brûlures était insupportable. Le Dr Gilles Fortin, un expert en maltraitance qui a témoigné au moment des représentations sur la peine, estime d'ailleurs qu'il est «quasi impossible qu'un enfant de 18 mois se soit infligé par lui-même ou accidentellement de telles blessures».

La DPJ a placé la victime en famille d'accueil jusqu'à l'âge de 18 ans. D'abord accusée de voies de fait infligeant des lésions corporelles, la mère a finalement été libérée de cette accusation. Aux yeux de la juge Villemure, la poursuite n'a pas fait la preuve des séquelles subies par la victime. Dans son jugement, la magistrate souligne toutefois du même souffle que les lésions constatées sur le corps de la victime laisseront des cicatrices permanentes.La poursuite, représentée par Me Josée Fontaine, réclamait une peine d'emprisonnement ferme tout en reconnaissant qu'une peine d'emprisonnement avec sursis pouvait être considérée puisque l'accusée est présentement enceinte. Quant à l'avocat de défense, Me Julien Archambault, il a beaucoup insisté sur les changements positifs survenus dans la vie de sa cliente. La juge Villemure lui a donné raison.

Aujourd'hui, la jeune femme de 25 ans ne consomme plus. Elle ne se prostitue plus. Elle a eu deux autres enfants avec un nouveau conjoint et est sur le point d'accoucher d'un troisième. La DPJ n'est jamais intervenue dans leurs cas, a d'ailleurs noté la juge. La mère est retournée à l'école où elle complète sa deuxième secondaire.

La mère est condamnée à purger une peine d'emprisonnement avec sursis de deux ans moins un jour. Cette peine sera suivie d'une ordonnance de probation de deux ans durant laquelle elle devra s'abstenir de consommer de la drogue, notamment. Elle aura aussi un couvre-feu à respecter durant la première année de sa peine.

L'accusée est en attente de recevoir sa peine dans un autre dossier, cette fois-ci de possession de crack en vue d'en faire le trafic datant de 2008. Son nouveau conjoint et elle viennent également d'être inculpés de menace au palais de justice de Longueuil. Le couple a plaidé non coupable. «Le risque de récidive n'est pas complètement écarté», a d'ailleurs relevé la juge.À sa sortie de la salle d'audience, la procureure de la Couronne a refusé de commenter la peine aux médias présents.  De son côté,  Me Archambault a insisté sur le fait que sa cliente, qui a passé son enfance en centre jeunesse, manquait d'outils dans la vie ; des outils qu'elle est présentement en train d'acquérir.  «À l'époque, elle était victime d'abus. Elle était droguée. Son pimp la contrôlait. Elle ne pouvait pas s'occuper d'elle-même et encore moins d'un bébé», a expliqué l'avocat de défense.