La firme de construction Infrabec, dont les dirigeants ont été arrêtés récemment par la SQ et accusés de collusion et de corruption, vient de se placer sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers. La raison? La Banque HSBC ne voudrait plus rien savoir de ces clients encombrants et leur réclamerait le remboursement de plusieurs millions de dollars en prêts divers.

C'est en tout cas ce que déplore Lino Zambito, vice-président de cette entreprise de construction de Boisbriand: «Notre banque nous a condamnés avant le tribunal, dit-il en entrevue téléphonique à La Presse. Elle a tenté de nous faire fermer.»

La Banque HSBC aurait décidé de réclamer le remboursement de tous les prêts qu'elle avait accordés à l'entreprise à la suite de l'arrestation de Lino Zambito et de son père, Giuseppe, par l'escouade Marteau en février dernier. Cela inclut des marges de crédit, des prêts hypothécaires et le financement de véhicules.

Lino Zambito refuse de dire à combien s'élève le total des sommes que réclame la HSBC. «Cela représente plusieurs millions», a-t-il résumé. Mardi dernier, Infrabec a obtenu un sursis d'un mois auprès des tribunaux. «Nous avons 30 jours pour nous réorganiser, monter un nouveau plan d'affaires et sauver 125 emplois», a dit Lino Zambito.

Bien qu'il n'ait plus de banque, il assure que les contrats de construction que sa firme a obtenus dans différentes villes ne sont pas en péril. «Ils sont tous cautionnés», dit-il.

Dans l'embarras

La firme Infrabec et ses dirigeants, qui obtiennent d'importants contrats publics dans la grande région de Montréal, en particulier à Boisbriand, ont souvent fait les manchettes dans les dernières années. En 2003 par exemple, Infrabec avait offert un tracteur de 28 000$ au DG de l'arrondissement de Saint-Laurent, où la firme obtenait plusieurs contrats. Le DG a été reconnu coupable d'abus de confiance, condamné à 200 heures de travaux communautaires et congédié. Personne n'a été accusé à Infrabec.

En octobre 2009, l'émission Enquête, à Radio-Canada, avait diffusé un enregistrement où l'on entendait Lino Zambito qui semblait tenter de convaincre la nouvelle mairesse Marlene Cordato, alors conseillère candidate au fauteuil de maire, et le conseiller Patrick Thiffault de ne pas se présenter.

Le 4 février dernier, Zambito père et fils se sont retrouvés parmi les cibles de la première grande frappe de l'escouade Marteau. Giuseppe et Lino Zambito ont été arrêtés, tout comme l'ex-mairesse de Boisbriand Sylvie St-Jean et France Michaud, vice-présidente de la firme de génie-conseil Roche, à la suite d'une enquête qui se penchait sur des faits remontant jusqu'en 2005.

En tout, ces 7 personnes sont accusées sous 28 chefs de fraude, de corruption, de trafic d'influence, d'abus de confiance, etc. La SQ a expliqué à l'époque que cette opération permettait de démonter un système de collusion articulé notamment autour des firmes de génie-conseil. «Ce système visait à fournir des avantages à certains conseillers ou élus de la ville en échange de décisions favorables dans l'octroi de contrats», avait alors déclaré l'inspecteur Denis Morin.

«On va faire face à la musique, dit Lino Zambito. Mais ce genre de ménage est artificiel et ne remonte pas à la source, qui se situe au niveau gouvernemental provincial. Tout se passe surtout au niveau des firmes de génie-conseil et d'avocats qui s'occupent du financement des partis. Nous, les PME de la construction, nous sommes les gilets pare-balles.»

La HSBC ne souhaite pas commenter l'affaire pour des questions de confidentialité.