Vingt-cinq ans après avoir participé à la tuerie de Lennoxville, l'ancien Hells Angel Jacques Pelletier jure qu'il n'a aucune envie de reprendre du service dans ce groupe de motards criminels.

La Commission nationale des libérations conditionnelles n'en est toutefois pas entièrement convaincue. C'est que Pelletier a été vu l'été dernier en compagnie d'un sympathisant des Hells qui a un casier judiciaire, alors que cela lui est interdit. Cette rencontre a hautement inquiété les commissaires, qui ont décidé de prolonger de six mois sa période de semi-liberté plutôt que de lui accorder la liberté totale à laquelle il était admissible.

«On n'a aucune félicitation à vous faire. On espère qu'il s'agissait d'une rencontre fortuite», a souligné la commissaire Marie-Claude Frenette au meurtrier lors de l'audience au Centre fédéral de formation, à Laval.

Cinq meurtres

En 1985, lors d'une purge interne, cinq Hells Angels du chapitre North de Laval avaient été attirés dans le bunker de Lennoxville puis abattus de sang-froid. Plusieurs Hells Angels étaient présents ce jour-là, mais seulement quatre d'entre eux, dont Jacques Pelletier, ont été jugés coupables des cinq meurtres prémédités. Ils ont été condamnés à la prison à vie, dont 25 ans fermes, en 1986. Les cinq corps avaient été trouvés dans le fleuve Saint-Laurent, enveloppés dans des sacs de couchage.

À l'époque, Jacques Pelletier était membre en règle des Hells Angels depuis à peine un an. Il n'avait pas encore 30 ans. Il rêvait de faire partie du club de motards depuis la fin de son adolescence. En 1995, après 10 ans derrière les barreaux, il a pris sa «retraite» des Hells. Il a eu deux enfants, qui ont aujourd'hui 10 et 16 ans, alors qu'il était toujours incarcéré.

«Ça ne m'intéresse plus (les Hells Angels). J'ai une autre vie, ma femme, mes enfants», a fait valoir l'ex-motard de 55 ans, qui s'est recyclé comme peintre en bâtiment depuis qu'il a obtenu une semi-liberté, en 2008. L'escouade antimotards de la Sûreté du Québec l'a tout de même toujours à l'oeil.

»Il n'avait pas l'air d'un gars de bicycle»

L'été dernier, des policiers l'ont vu discuter durant 30 minutes devant un dépanneur à Sainte-Sophie avec un homme qui a des liens avec des motards criminels. De son côté, Jacques Pelletier a expliqué aux commissaires que cet homme l'avait abordé en disant l'avoir reconnu. «Je ne le connaissais pas. Il n'avait pas l'air d'un gars de bicycle», s'est-il défendu. «Cela fait l'objet d'une enquête. Les policiers ne peuvent pas confirmer pour le moment que M. Pelletier est lié à cet homme», a précisé son agente de libération conditionnelle, Julie Dubois. Les deux commissaires avaient l'air sceptiques. «Pendant 30 minutes, soit vous vous êtes informé de tout votre monde, soit vous vouliez reprendre contact avec eux», lui a répliqué la commissaire Frenette.

Depuis l'opération SharQc, qui a fortement ébranlé les Hells Angels et leurs acolytes en avril 2009, les motards criminels sont en train de se réorganiser, selon des renseignements que la police a transmis à la CNLC. Certains, qui ont été condamnés après l'opération Printemps 2001, commencent à sortir de prison. «Pourquoi ne pas rembarquer?» a demandé la commissaire à l'ex-motard. «Impossible. Les policiers vont m'avoir à l'oeil toute ma vie avec ce que j'ai fait. Si je rembarque, je vais retourner en prison tout de suite», a répliqué le quinquagénaire.