La Cour suprême du Canada a refusé de se pencher de nouveau sur la liberté de la presse.

Le plus haut tribunal du pays a fait part de sa décision, jeudi, quant à la confidentialité de tractations entre Ottawa et une firme de publicité impliquée dans le scandale des commandites.

La Cour suprême a refusé d'entendre l'appel déposé par Polygone contre le groupe de presse Gesca et son journaliste Joël-Denis Bellavance, et a ainsi maintenu le jugement du tribunal d'appel québécois.

«C'est bon signe! Je pense que la Cour suprême se préoccupe de mettre des balises pour protéger la liberté d'expression et le droit du public à l'information. Plus ces balises sont claires, mieux les journalistes peuvent faire leur travail», a indiqué l'avocat du journaliste Joël-Denis Bellavance et du groupe Gesca, Christian Leblanc, du cabinet Fasken Martineau.

La Cour d'appel du Québec avait donné préséance à la liberté d'expression, en août 2009, en invalidant une décision de la Cour supérieure qui imposait le silence des médias quant aux négociations entre Ottawa et le Groupe Polygone.

Ottawa avait intenté une poursuite de 35 millions $ contre Polygone, afin de récupérer des sommes payées en trop à la firme.

Le gouvernement fédéral et Groupe Polygone Éditeurs ont mené des négociations hors cour quant au remboursement de sommes d'argent reliées au scandale des commandites.

À la suite d'un article dans le quotidien The Globe and Mail, rapportant l'état de ces discussions, la Cour supérieure du Québec avait interdit au journaliste Daniel Leblanc d'écrire de nouveau sur le sujet, à la demande du Groupe Polygone, en octobre 2008. Mais quelques mois plus tard, son collègue Joël-Denis Bellavance, de La Presse, avait à son tour détaillé les négociations.

La Cour supérieure avait donc étendu son ordonnance de non-publication afin que tous les médias du groupe Gesca ne rapportent plus les tractations confidentielles avec Ottawa tant qu'elles n'auraient pas abouti. Le juge du tribunal avait conclu que le droit à la vie privée avait préséance sur le droit à la liberté d'expression.

Gesca a toutefois remporté sa cause devant la Cour d'appel du Québec, qui a tranché que le jugement de la Cour supérieure empêchait les journalistes de faire leur travail d'enquête.

Une décision qui est donc maintenue par le plus haut tribunal du pays.

«Le débat avait été tranché dans l'affaire «Ma Chouette» - si une source journalistique avait commis une illégalité pour obtenir une information, est-ce que le journaliste devait s'abstenir de la publier - et la Cour suprême vient de dire non», a expliqué Me Christian Leblanc.

Il y a un mois, la Cour suprême avait reconnu le principe de protection des sources en accordant au journaliste Daniel Leblanc, dans une autre cause, le droit de protéger l'anonymat de «Ma Chouette», l'informateur par qui a été dévoilé en bonne partie le scandale des commandites.