Le service des enquêtes internes du SPVM n'a pas apprécié que deux policiers du Centre opérationnel (CO) Sud soumettent, le 1er juillet dernier, un rapport qui disculpait le policier Mario Lambert. Or, les deux policiers du CO Sud ont enregistré discrètement cette rencontre.

«La nature des informations était délicate. C'était notre seul moyen de protection si on nous prêtait des intentions», a relaté le sergent-détective Jean-François Lange, qui s'est servi de son téléphone pour enregistrer cette rencontre au bureau des enquêtes internes, au quartier général du SPVM. Le policier affirme que, dans la foulée de cette affaire, on a cherché à les «faire accuser en discipline».

Ces révélations ont été faites dans les derniers jours, au procès du policier Mario Lambert. Cet enquêteur de la Section des homicides est suspendu sans solde depuis le mois de septembre 2009. On l'accuse d'avoir colligé des renseignements sur des plaques d'immatriculation au Centre de renseignement policier pour transmettre ensuite le résultat à un criminel. Le procès de M. Lambert, qui clame son innocence, se déroule par à-coups depuis le mois de septembre devant le juge Jean-Pierre Dumais.

La rencontre du 1er juillet

Jean-Yves Lazure, qui a mené l'enquête sur Mario Lambert, était contre-interrogé depuis plusieurs jours par Me Richard Masson, avocat de l'accusé. C'est dans le cadre de ce contre-interrogatoire que la rencontre du 1er juillet dernier a été évoquée cette semaine. M. Lazure a reconnu avoir participé à cette rencontre. Outre lui-même, il y avait le commandant des enquêtes spéciales, Costa Labos, ainsi qu'Yvan Fortier et Jean-François Lange, deux sergents-détectives du CO Sud affectés à la moralité et aux gangs de rue.

En juin dernier, ces deux policiers ont voulu «réactiver» une source de Mario Lambert. Ils ont eu ordre de ne pas le faire parce que le procès de ce dernier était imminent. La section des renseignements leur a toutefois permis de rencontrer cette source pour l'aviser. C'est à ce moment que l'individu et a dit des choses qui «décriminaient» Mario Lambert, a expliqué Yvan Fortier, au cours de son bref témoignage devant le juge Jean-Pierre Dumais. En raison de règles de droit, le sergent Fortier n'a pu en dire plus.

Les paroles s'envolent

Quoi qu'il en soit, les sergents Fortier et Lange ont colligé ces renseignements dans un rapport et ont avisé leur supérieur. Ce dernier leur a recommandé de remettre cela aux service des enquêtes internes, ce qu'ils ont fait le 1er juillet. La rencontre avec le commandant Labos et l'enquêteur Lazure a duré une vingtaine de minutes. Selon le sergent Fortier, le commandant Labos semblait «dérangé» par leur rapport et leur coupait la parole. «Ma perception était que j'avais contrevenu à un ordre. J'ai dit: non, on va te lire le contenu...»

Hier, seul un court extrait de cet enregistrement a été joué en salle de cour. La défense voulait démontrer que M. Lazure avait bel et bien tenu certains propos lors de cette rencontre. Dans l'extrait entendu, M. Lazure dit à propos du rapport: «C'est écrit asteur. Les paroles s'envolent, les écrits restent. On ne peut pas jeter ça dans les poubelles.» Cette preuve a effectivement été transmise à la défense en août dernier.

Mais ce n'est que mardi, lorsque les deux policiers en question ont subitement été appelés à témoigner, que l'existence de l'enregistrement a été révélée. Le procès se poursuit aujourd'hui.