Privé d'arme à feu et d'un accès à Internet, David Abitbol ne représente pas une menace suffisante pour la sécurité du public au point de devoir le garder derrière les barreaux.

C'est  la conclusion à laquelle le juge Robert Marchi est arrivé en libérant sous caution l'homme de 28 ans ce matin au palais de justice de Montréal. L'accusé, dont le pseudonyme sur le web est Darkiller, est soupçonné d'avoir proféré des menaces de mort sur l'internet envers trois anciennes enseignantes et un ancien camarade de classe, d'entreposage négligent d'armes à feu et de possession de pornographie juvénile.

«C'est essentiel d'éliminer les deux ingrédients susceptibles de créer un cocktail explosif, soit l'accès à internet et la possession d'armes à feu», a indiqué le magistrat. Le juge Marchi a précisé que les propos tenus par l'accusé lors de séances de clavardage avec un ancien camarade de classe «font frémir». Toutefois, ce sera au juge du procès de décider si le jeune homme doit être condamné pour avoir tenu de tels propos.

David Abitbol devra respecter plusieurs conditions sévères de mise en liberté. Il devra prendre rendez-vous avec un psychiatre d'ici demain, en plus de respecter un couvre-feu. Il lui sera également interdit de posséder des armes à feu, de fréquenter un club de tir et d'utiliser un ordinateur. Il n'aura pas le droit de communiquer avec ses présumées victimes ni avec l'ex camarade de classe de l'école primaire qui l'a dénoncé, Alain Diamond.

Le juge Marchi estime que les parents de David Abitbol pourront offrir à ce dernier un «encadrement serré». Le magistrat a toutefois servi un avertissement au père de l'accusé, Joseph. Le juge a été «troublé» et «renversé» par l'«attitude désinvolte» du père. Bien que tout père veuille protéger son fils, même un père doit un jour faire face à la musique, a précisé le magistrat.

Joseph Abitbol a qualifié les propos tenus par son fils sur Facebook de «niaiseries» plus tôt lors de son témoignage à l'enquête sur mise en liberté. «J'aurais hésité à remettre en liberté l'accusé sur la seule foi du témoignage du père», a dit le juge. Le témoignage de la mère, Michèle, était plus crédible, selon le magistrat. La mère a qualifié les propos de son fils de «surprenants, bouleversants et sérieux».

Le magistrat a tenu compte de plusieurs autres facteurs pour justifier sa décision. David Abitbol est davantage «immature» que dangereux, selon le criminologue Thierry Webanck qui l'a évalué. À ses yeux, même si David Abitbol dit voir des lutins, il ne semble pas souffrir de maladie mentale.

David Abitbol occupe un emploi et n'a pas d'antécédent judiciaire. De plus, il avait tous les permis nécessaires pour posséder des armes à feu. Ces armes n'étaient pas chargées lorsque les policiers de la Sûreté du Québec les ont saisies, le 2 octobre dernier, au domicile familial sur le boulevard Gouin est, a aussi noté le magistrat.

Les parents de l'accusé, qui portaient tous deux de grosses lunettes fumées, ont quitté le palais de justice en se contentant de dire qu'ils étaient satisfaits de la décision. «Cette décision a été prise après que le juge ait considéré toute la preuve. C'est son devoir de le faire. Il ne peut pas rendre une décision en se basant seulement sur les éléments sensationnels du dossier, s'est réjoui l'avocat de défense, Charles Benmouyal. La dangerosité de M. Abitbol est relative et peut être encadrée.»

De son côté, le procureur de la Couronne, Steeve Larivière, veut étudier le jugement de façon approfondie avant de déterminer s'il détient des motifs d'appel. David Abitbol revient en cour le 24 novembre pour la suite du processus judiciaire.