Deux établissements liés au milieu des échangistes, situés presque côte à côte sur la Plaza Saint-Hubert, ont été la cible d'incendies criminels peu avant 23h lundi soir. Les propriétaires des endroits visés nient toutefois que des tensions entre clubs rivaux soient à l'origine de ces attentats.

Les deux incidents ont éclaté presque simultanément. Un cocktail Molotov a d'abord été lancé à l'intérieur du bar échangiste Le Céleste. Les flammes ont rapidement été maîtrisées et les dégâts se sont limités à la cage d'escalier.

Le bar Coco Bongo, à quelques portes de là, a pour sa part été complètement ravagé par le brasier. Des témoins ont entendu plusieurs explosions à l'intérieur de ce tout nouvel établissement, ouvert il y a à peine quelques semaines.

Ce nouvel acteur de la vie nocturne montréalaise appartient au fils du propriétaire d'un autre bar échangiste de la métropole, le Sauna-mixte 3333, rue Bélanger.

À l'image d'un bar homonyme bien établi à Cancun, le Coco Bongo offrait des spectacles thématiques et s'apprêtait également à organiser quelques soirées échangistes durant la semaine.

L'intérieur de l'établissement a été complètement détruit, selon des employés de Service d'urgence sinistre Yon, rencontrés hier alors qu'ils barricadaient l'immeuble. Les commerces voisins du Coco Bongo ont aussi été endommagés par les flammes.

Les pompiers ont confié les deux dossiers à la section des incendies criminels du Service de police de la Ville de Montréal. Deux suspects ont été arrêtés alors qu'ils fuyaient les lieux du crime le soir des attaques.

Manque de chance, les deux hommes sont tombés face à face avec trois policiers qui faisaient une ronde à pied au même moment.

Marc-André Paquette, 39 ans, de Mascouche et Pasqualino Simeoni, 42 ans, de Terrebonne ont comparu hier après-midi au palais de justice de Montréal. Ils ont été inculpés de trois chefs d'accusation d'incendie criminel et de complot. La Couronne s'est opposée à la mise en liberté des deux accusés. Ils seront de retour en cour aujourd'hui pour leur enquête sur cautionnement.

Le milieu échangiste réagit

Rencontré dans son bar de la rue Bélanger, le propriétaire du Sauna-mixte 3333, Christian-Dominique Éthier, était en quête de réponses au lendemain de l'attaque.

Accompagné de son fils Julien Bellemare, jeune propriétaire du Coco Bongo, M. Éthier a préféré se faire avare de commentaires puisque l'enquête s'amorce à peine.

Son fils venait de faire l'acquisition de l'établissement, anciennement le bar Chez Clo-Clo. «On a mis 120 000$ de rénovations et nous n'étions même pas encore passés chez le notaire!» a pesté M. Éthier.

Il ignore qui voudrait s'en prendre à lui. M. Éthier n'écarte pas que le succès naissant du Coco Bongo, avec plusieurs soirées très fréquentées, puisse avoir suscité de la jalousie. «Est-ce que c'est parce qu'on vient d'annoncer qu'on va aussi s'adresser à une clientèle échangiste?» s'est interrogé M. Éthier, qui a fermé et quitté le Coco Bongo la veille 15 minutes avant les attaques.

Il dit n'avoir fait l'objet d'aucune menace et estime que le milieu échangiste est pacifique. «Le Sauna-mixte est ici depuis six ans, c'est une place tranquille et on n'a jamais eu de problèmes. On a 60 000 membres, on est le plus gros club au Canada!» a résumé M. Éthier.

Photo: Sylvain Ryan, collaboration spéciale

Un incendie a causé de lourds dommages à l'édifice du 6965 de la rue Saint-Hubert.

La consternation était la même au bar Le Céleste, l'autre endroit visé, où le propriétaire André Nadeau discutait au comptoir avec Alain Joyal, patron d'une autre boîte échangiste, l'Auberge 1082, celle-là épargnée par les attaques.

Les deux tenanciers jurent n'avoir fait l'objet d'aucune menace et nient toute forme de tensions entre les quelques bars en activité à Montréal.

«Il n'y a pas de guerre dans le milieu échangiste! On se parle et on collabore», a martelé M. Nadeau. Ce dernier dit n'avoir jamais été embêté non plus par le crime organisé.

Selon André Nadeau, les bars Le Céleste, le Sauna-mixte 3333 et l'Auberge 1082 sont les trois endroits les mieux établis en ville, et leurs propriétaires collaborent davantage qu'ils ne se concurrencent.

«On se complète puisqu'on offre des choses différentes d'une place à l'autre. C'est comme McDonald's, Burger King et Wendy's. Chacun est indissociable de l'autre. Si t'as le goût d'un Big Mac, tu vas chez McDo, mais si t'as le goût d'autre chose, tu vas ailleurs», a illustré, à sa façon, André Nadeau.

- Avec Caroline Touzin

Photo: Patrick Sanfaçon, La Presse

Un objet incendiaire a été lancé au 7067 de la rue Saint-Hubert, lundi soir.