La Cour suprême du Canada a rejeté à l'unanimité, vendredi, la demande du tueur en série Robert Pickton qui souhaitait obtenir un nouveau procès. À la lumière de cette décision, la Couronne de la Colombie-Britannique a annoncé qu'elle demanderait la suspension des 20 accusations qui pèsent toujours contre Pickton.

Le plus haut tribunal du pays a conclu à l'unanimité que le droit de Pickton à un procès juste n'avait pas été nié par les directives finales au jury faites par le juge de son premier procès. Les magistrats étaient cependant divisés, à six contre trois, quant aux raisons soutenant la décision rendue vendredi.

Pickton, un éleveur de porcs de Port Coquitlam, en Colombie-Britannique, a été reconnu coupable en décembre 2007 du meurtre au second degré de six femmes dans la région de Vancouver. Il fait également face à des accusations pour les meurtres de 20 autres femmes.

Pickton purge une peine de prison à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans. Il ne pourra donc pas faire de demande de libération conditionnelle avant l'âge de 85 ans.

Son avocat avait fait valoir, en portant le verdict en appel, que le juge de son procès avait commis une erreur dans ses directives au jury. Mais la Couronne avait soutenu que, s'il y avait eu une erreur, elle ne serait pas assez grave pour annuler la condamnation et lui accorder un nouveau procès.

Son procès aura duré plus d'un an, mais l'appel portait essentiellement sur une question posée par les jurés au juge, au sixième jour de leurs délibérations. Le groupe voulait savoir s'il pouvait trancher que Pickton était coupable même s'il concluait qu'il avait agi indirectement.

Le juge avait alors expliqué aux jurés qu'ils pouvaient déclarer Pickton coupable s'ils jugeaient qu'il avait été «de toute façon un participant actif» aux meurtres.

La défense de Pickton avait alors argué que la réponse du juge au jury laissait place à une condamnation de son client sans qu'elle ait la chance de le défendre correctement, puisque la poursuite de la Couronne reposait sur le fait que Pickton était le seul responsable des crimes.

Écrivant pour la majorité de ses collègues de la Cour suprême, la juge Louise Charron a toutefois statué que le juge aurait fait une erreur en ne précisant pas ses instructions aux jurés, puisque sa première accusation portait à confusion.

Pickton a été reconnu coupable, il y a près de trois ans, des meurtres au second degré de Mona Wilson, Sereena Abotsway, Brenda Wolfe, Marnie Frey, Andrea Joesbury et Georgina Papin.

La décision de la Cour suprême détermine par ailleurs également le sort d'autres accusations qui pèsent contre Pickton, concernant les meurtres de 20 autres femmes. Un juge avait divisé les 26 accusations en deux groupes, et le procès portant sur ces 20 autres meurtres avait été suspendu en attendant le jugement de la Cour suprême.

Comme le premier verdict a été confirmé par la décision rendue par le plus haut tribunal du pays, vendredi, la Couronne de la Colombie-Britannique a annoncé qu'elle recommanderait la suspension des accusations supplémentaires.

Un porte-parole de la Couronne, Neil MacKenzie, a indiqué que Robert Pickton purgeait déjà une peine d'emprisonnement à vie sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans. Il s'agit de la peine légale la plus élevée.

La Couronne entendait agir dans un «futur proche» afin d'officiellement mettre fin aux accusations restantes, a-t-il affirmé.

«Nous reconnaissons que même si la famille et les amis de certaines victimes de M. Pickton comprennent et acceptent cette position, d'autres ont de la difficulté à l'accepter», a précisé M. MacKenzie.

«Pour prendre cette décision, le bureau a pris en compte le fait qu'aucune condamnation additionnelle ne pourrait faire augmenter la peine que M. Pickton doit purger», a-t-il ajouté.

La décision intervient plus de 10 ans après qu'un journal de Vancouver eut commencé à relier les disparitions de plusieurs femmes dans la région.

Le procès de Pickton avait été précédé de l'une des plus importantes enquêtes policières dans l'histoire du pays, qui comptait des milliers d'éléments de preuve.

Le chef-adjoint de la police de Vancouver, Doug Lepard, a affirmé qu'il avait entrepris une révision complète du cas Pickton et a offert ses excuses. Son service a été âprement critiqué par les familles des victimes et certains groupes de pression, car des femmes ont continué à disparaître malgré un nombre croissant de témoignages à la police.

«Aux familles des femmes disparues, j'aimerais vous dire que j'aurais sincèrement espéré que nous l'attrapions plus tôt», a-t-il déclaré, ému, à une conférence de presse.

«Je souhaiterais que nous ayons fait mieux sur plusieurs plans. Je souhaiterais que toutes les erreurs que nous avons faites puissent être annulées. Je souhaiterais que plus de vies aient pu être sauvées», a-t-il ajouté.