Un avocat qui a déjà défendu des Hells Angels se trouve dans l'embarras. Martial Fillion a été inculpé de trois chefs d'accusation liés à des activités de gangstérisme, hier, au palais de justice de Montréal.

Selon nos sources, le criminaliste aurait agi à titre de commissionnaire et de «facilitateur» pour les Syndicates. Ce groupe criminel avait été fondé par Gregory Wooley, en pleine guerre des motards, à la demande du chef des Hells Angels Nomads, Maurice Boucher. Le but était d'améliorer les relations des motards avec certains gangs de rue et de renforcer leurs assises dans le centre-ville de Montréal.

Les enquêteurs de la police de Montréal ont découvert les activités criminelles alléguées de l'avocat au cours de l'opération Axe, qui a permis l'arrestation de 54 personnes liées aux gangs de rue en février 2009. Trois groupes ont été ébranlés par cette rafle: le clan des frères Zéphir, celui des frères Lavertue et les Syndicates.

Les dirigeants des Syndicates, dont Wooley, étaient en prison depuis mai 2006. Toutefois, ils ont été inculpés de nouveau puisqu'ils auraient continué à toucher des redevances du trafic de drogue derrière les barreaux. Ces redevances leur auraient été remises par les clans Lavertue et Zéphir. Les frères Lavertue se sont reconnus coupables de trafic de cocaïne et de gangstérisme plus tôt cette année. Quant aux frères Jean Ismaël et Emmanuel Zéphir, ils sont toujours en attente de leur procès.

Une certaine confusion

Me Martial Fillion, 58 ans, est soupçonné d'avoir participé aux activités d'une organisation criminelle de janvier 2006 à février 2009. Il est également inculpé de deux chefs liés à la possession de biens criminellement obtenus. «Ce sont des accusations extrêmement sérieuses», a indiqué la procureure de la Couronne, Me Isabelle Doray, à sa sortie de la salle d'audience.

Au moment de la comparution de Me Fillion, hier, une certaine confusion régnait sur l'identité de son avocat. L'une de ses consoeurs, Me Lise Rochefort, s'est avancée pour dénoncer la façon dont l'arrestation avait été menée, plus tôt dans la journée. L'accusé aurait été menotté alors qu'il était hospitalisé après un triple pontage coronarien, a-t-elle dénoncé. «Le bon jugement ne tue personne», a-t-elle dit à la juge Ruth Veillet.

La magistrate n'a pas voulu en entendre davantage puisque, au même moment, une autre avocate, Me Geneviève Cardin, est arrivée pour représenter l'accusé. Ce sera finalement Me Christian Desrosiers, du même bureau que Me Cardin, qui défendra le criminaliste. Ces allégations d'arrestation abusive n'ont pas semblé ébranler la Couronne. «Ces allégations complètement farfelues seront contestées», a indiqué Me Isabelle Doray. La Couronne ne s'est pas opposée à la mise en liberté de Me Fillion moyennant une caution de 5000$.

Dans sa carrière de criminaliste, Me Fillion a déjà agi à titre d'avocat-conseil à l'occasion du septième anniversaire du chapitre des Hells de Trois-Rivières. Sa tâche était de s'assurer que les policiers qui interceptaient et fichaient les motards aux abords du repaire ce jour-là ne bafouaient pas les droits de ses clients. Le criminaliste retournera en cour le 13 septembre.