Un attentat dans la nuit qui suit la fête du Canada, dans un centre de recrutement des Forces armées canadiennes alors que la reine est en visite au pays... Cela n'a rien d'innocent, estime Houchang Hassan-Yari, professeur au Collège militaire royal du Canada de Kingston. Le groupe qui a revendiqué le geste, Résistance internationaliste, termine d'ailleurs son communiqué en indiquant que les soldats canadiens «appartiennent à celle à qui ils prêtent bêtement allégeance, sa majesté Élisabeth II».

Selon Houchang Hassan-Yari, il est peu probable que le moment choisi n'ait pas de lien avec le contexte politique, moins d'une semaine après les sommets du G8 et du G20, qui ont eu lieu sous forte supervision policière.

 

Le G20, élément déclencheur

«Je ne serais pas étonné que la réponse de la police au G8 et au G20 ait été l'élément déclencheur», croit Michel Juneau-Katsuya, ancien agent du SCRS et spécialiste des questions de sécurité.

Le symbole choisi est fort, estime aussi le lieutenant-colonel à la retraite Rémi Landry, chargé de cours à l'école de politique l'Université de Sherbrooke. «La cible est très porteuse, explique-t-il, car les gens font immédiatement le lien avec ce qui se passe en Afghanistan.»

Une chose est certaine: le groupe a atteint son but puisque l'histoire a fait le tour du pays hier matin. «Il ne faut pas oublier que les groupes terroristes ne veulent que ça: qu'on parle d'eux», dit Houchang Hassan-Yari.

Mais les conséquences iront bien au-delà, estime Rémi Landry. «Ça vient aussi alimenter la crainte qu'un attentat terroriste arrive chez nous», ajoute le lieutenant-colonel à la retraite. Selon lui, il faut s'attendre à un resserrement des mesures de sécurité autour des lieux stratégiques dans les jours qui viennent.

«La sécurité et le bien-être de notre personnel demeure une priorité pour les Forces armées canadiennes, nous prenons très au sérieux ce genre d'incident» a indiqué le capitaine Rob Bunguay, du ministère de la Défense nationale. Il n'a toutefois pas donné de détails sur les mesures qui seraient prises pour maintenir la sécurité dans les centres de recrutement ou autour des immeubles de l'armée canadienne.

»Opportunistes»

Selon Michel Juneau-Katsuya, il est possible que cet attentat incite effectivement d'autres groupes revendicateurs à passer à l'acte. Il s'agit selon lui d'un acte commis par des «terroristes opportunistes», c'est-à-dire des gens - ou, dans ce cas-ci, un seul individu, croit ce spécialiste - qui profitent du contexte pour promouvoir une cause ou une autre. Dans cette catégorie, la bombe qui a explosé à Trois-Rivières dans la nuit de jeudi à vendredi porte à 13 le nombre d'attentats commis au Canada depuis cinq ans, dont trois au Québec, calcule Michel Juneau-Katsuya.

«Ce sont des gens qui ne cherchent pas à faire des victimes», dit-il. C'est pourquoi ils ont fait exploser leur bombe dans la nuit. Mais un jour, il y aura quelqu'un qui fait le ménage ou qui se trouve au mauvais endroit au mauvais moment, dit-il.