Infrabec, la compagnie de Lino Zambito, a fait preuve d'une « volonté d'intimider » le citoyen de Boisbriand Martin Drapeau, qui avait posé des questions au conseil municipal sur la construction de l'usine d'épuration de la Ville.

Ce contrat a été attribué au seul soumissionnaire, Infrabec.Infrabec poursuivait M. Drapeau pour 150 000$ pour atteinte à sa réputation. Le 9 avril, la juge Danielle Turcotte a rejeté cette poursuite séance tenante, appliquant pour la première fois les dispositions contre les poursuites-bâillon. Les motifs de ce jugement historique viennent d'être publiés.

« Le défendeur (M. Drapeau) a rapporté que M. Zambito lui a dit « qu'il était mieux de s'excuser, sinon, il trouverait l'été long »... Force est de constater que l'objectif était de mettre un terme au débat », note la juge Turcotte, de la Cour supérieure.

« Tout indique que la poursuite est motivée par la volonté d'intimider le défendeur », conclut-elle.

Elle souligne aussi que la poursuite contre M. Drapeau lui a été signifiée un samedi après-midi. « Le procès-verbal de l'huissier ne mentionne aucune tentative antérieure de signification, note la juge. C'est donc délibérément qu'on a choisi ce moment. »

Joint par La Presse, M. Zambito a affirmé que la décision d'en appeler de la décision n'a pas été prise. « Les avocats ont le texte du jugement entre les mains, dit-il. D'ici deux jours ils vont prendre position. On a jusqu'au 9 mai. »

« À mon avis, pour savoir s'il y a eu diffamation, il aurait que le juge entende toute l'histoire, tous les témoins sur le fond », a-t-il ajouté.

L'affaire a pris naissance au conseil municipal de Boisbriand, le 5 mai 2009. M. Drapeau pose alors une question sur l'attribution en septembre 2007 du contrat de réfection de l'usine de traitement des eaux usées. Il demande une vérification par une « firme comptable indépendante (du) processus d'attribution du contrat ».

Le contrat est allé au seul soumissionnaire, Infrabec, qui avait offert 29 millions. D'autres entreprises avaient retiré le cahier de charges, sans présenter de soumission. Le contrat de l'usine d'épuration était évalué à environ 16 millions de dollars, mais les coûts ont finalement atteint 38 millions.

Le contexte a bien changé depuis le dépôt de la poursuite. Le scandale a frappé la mairesse d'alors, Sylvie Jean, à la suite de la tentative de M. Zambito de convaincre son opposante Marlene Cordato de renoncer à la mairie. Mme Cordato a battu Mme Jean aux élections l'an dernier.

La juge Turcotte a rappelé un jugement de la Cour suprême sur la démocratie municipale, qui « suppose la confrontation des points de vue et les débats ouverts, parfois vigoureux et passionnés. »

« Si les règles entourant le déroulement de pareils débats sont appliquées de manière à laisser craindre à ceux qui y participent d'être traînés devant les tribunaux au moindre écart, la probabilité qu'ils choisissent de se retirer de la chose publique s'accroît. »