Un des chefs et 12 membres de la famille Gambino, la principale des cinq familles mafieuses de New York, ont été arrêtés hier et accusés de plusieurs crimes, allant de meurtres et de l'utilisation d'une mineure dans un réseau de prostitution à l'extorsion dans l'industrie de la construction. Une quatorzième personne a été arrêtée vendredi.

Il s'agit d'une des plus importantes opérations contre la Cosa Nostra américaine depuis l'arrestation du chef et de 70 membres et associés de la famille Bonanno au début des années 2000. La plupart d'entre eux ont été condamnés pour meurtre, pari illégal et racket. La mafia montréalaise relève des Bonanno de New York qui, de leur côté, sont étroitement associés aux Gambino.

 

Le communiqué de presse publié hier par le bureau du procureur des États-Unis, et mis en ligne sur le site internet du FBI, indique que les soldats et les associés de la famille Gambino recrutaient des prostituées dans des bars de danseuses, notamment une adolescente âgée de 15 ans. Ils annonçaient leurs services sur l'internet et conduisaient les prostituées vers leurs clients.

Daniel Marino, un des dirigeants présumés de la famille Gambino, est aussi accusé d'avoir ordonné le meurtre, à partir de la prison où il était détenu, de son neveu parce que celui-ci collaborait avec le FBI. Les tueurs ont attiré l'homme dans une boîte de nuit de Staten Island, en 1998, et l'ont abattu de trois balles.

Marino est aussi accusé d'avoir monté un vaste réseau d'extorsion dans l'industrie de la construction à New York et dans la région depuis 1980. «En utilisant la violence et les menaces, Marino et la famille Gambino ont extorqué des millions de dollars chaque année aux syndicats, aux entrepreneurs, aux promoteurs et aux fournisseurs», indique le communiqué.

«L'opération d'aujourd'hui montre que la mafia n'est pas morte, a déclaré le procureur Preet Bharara, hier. Elle est bien vivante et capable de frapper. Les mafieux d'aujourd'hui sont peut-être moins colorés, moins flamboyants et moins tapageurs que certains de leurs prédécesseurs, mais ils terrorisent toujours les entreprises, en utilisant des bâtons de baseball, et en envoyant des gens à l'hôpital. Aujourd'hui, la famille Gambino a perdu un de ses chefs et plusieurs de ses étoiles montantes sont tombées.»

Selon des informations que La Presse a obtenues, la famille Gambino a envoyé deux de ses représentants à Montréal après l'extradition de Vito Rizzuto aux États-Unis, en 2006. Les policiers manquent d'informations précises sur leur mandat, mais ils croient qu'ils étaient préoccupés par une possible désorganisation de la mafia montréalaise après le départ forcé du parrain de la mafia canadienne.

Il est possible que les représentants de la famille Gambino aient cherché à réorganiser l'antenne de la famille Bonanno à Montréal. Apparemment sans grand succès, la confusion régnant toujours dans la mafia montréalaise.

Vito Rizzuto, détenu au Colorado pour le meurtre de trois capitaines rebelles de la famille Bonanno en 1981, doit être libéré à l'automne 2012. «Je suis sûr qu'il reprendra ses fonctions», a dit un homme qui le connaît bien, propriétaire d'un café italien dans l'arrondissement de Rivière-des-Prairies, au cours d'un entretien avec La Presse, la semaine dernière. D'autres observateurs en sont moins sûrs. Certains affirment que des membres du clan calabrais ont quitté l'Ontario pour tenter de reprendre le contrôle de la pègre italienne à Montréal.

Par ailleurs, le chef de la famille Bonanno, Salvatore Montagna, se trouve à Montréal depuis un an. Montagna, surnommé Sal the Ironworker parce qu'il possède une entreprise spécialisée dans le métal à New York, détient la citoyenneté canadienne. Il est né à Montréal en 1971 et a grandi à Castellamare del Golfo, en Sicile, qui est également le village natal du fondateur de la famille Bonanno, Joe Bonanno.

Montagna s'est installé avec sa famille à New York alors qu'il était encore adolescent. Il a pris la succession de Joe Massino, lequel a commencé à collaborer avec la justice après son arrestation en 2003. Les autorités américaines de l'Immigration l'ont arrêté l'année dernière et l'ont expulsé au Canada. Il tente depuis de retourner aux États-Unis.