Pour dormir ensemble malgré les milliers de kilomètres qui les éloignent, un Montréalais récemment séparé et sa nouvelle flamme, qui réside à Vancouver, se couchent en laissant leur téléphone Bluetooth ouvert. Cette pratique épuisante a contribué à faire perdre à un père la possibilité d'obtenir la garde partagée de ses enfants.

«Papa est toujours fatigué. Papa est hypnotisé par le téléphone», se plaignait l'aîné des deux enfants, en revenant des visites chez son père. Et pour cause. Entre novembre 2009 et janvier dernier, l'homme, qui travaille en alimentation, passait en moyenne 300 heures par mois (une dizaine d'heures par jour) au téléphone avec la femme de Vancouver, que nous appellerons Rachel, puisqu'il est interdit d'identifier les parties. «Les factures détaillées relatives au téléphone cellulaire qu'il utilise sont non seulement révélatrices du temps qu'il consacre au téléphone avec Rachel, notamment la nuit, mais sont en outre éloquentes sur la fascination, le mot est même faible, que cette relation exerce sur lui... Comment alors peut-il être aussi présent et disponible pour les enfants s'il ne bénéficie pas d'une nuit de sommeil? Poser la question, c'est y répondre», a noté la juge de la Cour supérieure Lise Matteau, en refusant, pour le moment, la garde partagée des deux enfants à l'homme. C'est la mère des petits qui obtient la garde, et le père se voit concéder des droits d'accès.

 

Après une relation de plus de 10 ans, ce couple a volé en éclats l'automne dernier, quand la mère a découvert que son conjoint entretenait une liaison à distance, avec une femme de Vancouver. C'est en installant un logiciel de contrôle parental dans l'ordinateur, pour leurs deux enfants âgés de moins de 10 ans, que la conjointe a trouvé des centaines de courriels à caractère sexuel, que l'homme et Rachel s'étaient échangés. L'homme a commencé par nier, puis, devant la preuve irréfutable des courriels, il a avoué qu'il avait repris contact avec Rachel. La mère a exigé la séparation immédiate. Devant la juge, le père a qualifié la réaction de sa conjointe de «grosse explosion».

Responsable aussi du premier divorce

Rachel n'est pas une nouvelle venue dans la vie de l'homme. C'est une amie de longue date, qui a même été à l'origine du premier divorce de celui-ci, a noté la juge. L'homme considère avoir retrouvé «l'amour de sa vie».

La juge Matteau ne remet aucunement en question les qualités parentales du père. «Toutefois, là où le bât blesse, c'est que depuis qu'il a rencontré sa nouvelle conjointe, force est de constater que Monsieur est obnubilé par cette relation, à telle enseigne que son comportement et son jugement laissent parfois à désirer, ceci au détriment de l'intérêt des enfants et de leur stabilité», note-t-elle, après avoir signalé quelques incidents survenus depuis la séparation.

Parmi eux, on note une crise de larmes qui a mené l'homme à l'hôpital un soir de novembre, et le fait que, pendant qu'il était au téléphone un autre soir, ses enfants ont écouté le film La tête de Normande Saint-Onge, et qu'ils en ont été bouleversés. «Maman, on a vu un film dégueulasse chez papa», ont-ils dit à leur mère, en décrivant en détail les scènes sexuelles explicites qu'ils avaient vues.