Adil Charkaoui, ce Montréalais soupçonné d'être un terroriste qui a passé plusieurs années sous stricte surveillance, a annoncé vendredi qu'il avait intenté une poursuite contre le gouvernement fédéral.

L'homme d'origine marocaine a indiqué qu'il demandait 24,5 millions $ afin de laver sa réputation entachée après avoir tenté en vain d'obtenir des excuses d'Ottawa.

En entrevue avec La Presse canadienne vendredi, M. Charkaoui a affirmé que la poursuite civile, déposée devant la Cour supérieure du Québec le 22 février, n'était pas une question d'argent. «Je le fais pour laver mon nom. C'est très important pour moi», a-t-il révélé.

Il a raconté avoir envoyé une lettre au gouvernement pour réclamer des excuses, la citoyenneté canadienne et une compensation pour les revenus perdus et les frais juridiques. Mais Ottawa s'est contenté de répondre qu'il n'avait fait que son travail.

«Pour moi, ça voulait dire 'Allez au diable', s'est rappelé M. Charkaoui. C'est une question de responsabilité. Je veux laver mon nom. Ils ont fait une erreur et ont détruit ma vie au Canada et à l'extérieur du Canada. Ils doivent payer pour ce qu'ils ont fait.»

Pendant plus de six ans, Adil Charkaoui a été suspecté d'être un agent d'Al-Qaeda. Il a passé 21 mois derrière les barreaux, a été contraint de porter un bracelet électronique et a manqué la naissance de son fils.

Une juge de la Cour fédérale a statué en octobre que le certificat de sécurité ayant servi à arrêter M. Charkaoui en 2003 devait être révoqué et que le gouvernement fédéral n'avait pas le droit de porter ce jugement en appel.

Les arguments du gouvernement contre le Montréalais avaient commencé à faiblir l'année dernière lorsque les avocats fédéraux avaient retiré des preuves sous prétexte qu'elles menaçaient la sécurité nationale.

M. Charkaoui a déclaré vendredi qu'il n'avait pas voulu parler de la poursuite plus tôt parce que ses avocats mettaient la touche finale au dossier. Mais il a vendu la mèche cette semaine en mentionnant ses démarches judiciaires lors d'une conférence à Sherbrooke sans savoir qu'un journaliste se trouvait dans la salle.

Il a précisé que la procédure était entamée mais que la documentation serait envoyée à Ottawa au cours des prochaines semaines. Trois de ses quatres enfants figurent comme demandeurs dans la poursuite.

Âgé de 36 ans, Adil Charkaoui enseigne le français à temps plein et complètement actuellement son doctorat.