Confisquer le passeport d'une personne qui ne paie pas sa pension alimentaire contrevient à l'article 6 de la Charte des droits et libertés. Mais cette atteinte est justifiée par le bien-être des enfants et de la société en général, vient de trancher la Cour supérieure.

L'homme qui a porté cette cause devant les tribunaux, Daniel Caruso, devait payer une pension de 750$ par mois à son ex-femme pour leurs trois enfants, selon un jugement de divorce rendu en 2001. Mais dès l'année suivante, l'homme avait déjà accumulé 9000$ en arriérés, somme qui n'a cessé de gonfler au cours des années pour atteindre 82 000$ en 2010. Il y a cinq ans, parce qu'il n'avait toujours pas payé et n'avait pas fait d'arrangement en ce sens, M. Caruso s'est fait confisquer son passeport. Cette mesure est couramment utilisée. Dans certaines provinces canadiennes, on va même jusqu'à confisquer le permis de conduire du mauvais payeur.

 

Deux articles en balance

Dans cette affaire, le juge William Fraiberg a mis en balance deux articles de la Charte des droits et libertés. L'article 6 garantit aux citoyens le droit de demeurer au Canada, d'y entrer ou d'en sortir. Pour cela, il faut pratiquement toujours un passeport. Caruso invoquait donc l'atteinte à ses droits fondamentaux. D'un autre côté, l'article 1 de la Charte stipule que les droits «ne peuvent être restreints que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables, et dont la justification puisse se démontrer dans une société libre et démocratique». Le paiement des pensions alimentaires bénéficie aux enfants et à la société en général, et cela l'emporte sur l'inconvénient d'être empêché de voyager parce qu'on est temporairement privé de passeport, a conclu le juge.

Me Clemento Monterosso, qui représentait M. Caruso dans cette affaire, a indiqué à La Presse qu'il n'interjettera pas appel.