C'est d'un ton posé et professionnel, malgré toute l'émotion que suscitaient visiblement ces souvenirs, qu'un policier, un ambulancier et un médecin sont venus raconter à la cour mardi matin les circonstances de leur intervention auprès du cardiologue Guy Turcotte, accusé du meurtre de ses deux enfants.

L'enquête préliminaire sur M. Turcotte, 37 ans, s'est poursuivie pour la deuxième journée au palais de justice de Saint-Jérôme. Frappée d'une interdiction de publication, elle vise à déterminer s'il y a assez de preuves pour l'inculper. La Couronne entend l'accuser du meurtre prémédité de ses deux enfants, Olivier, 5 ans, et Anne-Sophie, 3 ans. Les deux ont été tués à l'arme blanche le 21 février 2009, au moment où leur mère était en voyage de ski. Guy Turcotte était séparé au moment du drame.Des trois témoins entendus, c'est le récit d'une ex-collègue, la Dre Marie-Pierre Chartrand, qui a surtout retenu l'attention. C'est elle qui, après le drame, a reçu et soigné Guy Turcotte à son arrivée à l'Hôtel-Dieu de Saint-Jérôme, où il pratiquait comme cardiologue et comptait de nombreuses connaissances.

Les médias ont dit l'an dernier que M. Turcotte avait tenté de se suicider ce jour-là en avalant deux litres de lave-glace. On a par ailleurs appris l'automne dernier qu'il avait tenté de se suicider une autre fois au mois de novembre, dans sa cellule de la prison de Rivière-des-Prairies.

La Dre Chartrand a longuement expliqué son intervention médicale, les tests qui ont été pratiqués sur le cardiologue dès son admission aux urgences et son attitude générale avant qu'on l'envoie dans un hôpital montréalais.

L'urgentologue a raconté cet épisode avec un certain détachement. Elle a été plus émue quand elle a rapporté les propos qu'a tenus M. Turcotte pendant les quelque trois heures qu'il a passées sous sa supervision.

Murmures

Plus tôt en matinée, le policier Marc-Antoine Bigué, de la Sûreté du Québec, avait décrit son intervention à partir de son arrivée à la résidence familiale. Il a raconté ce qu'il a vu ce matin-là avec aplomb et précision, sous l'oeil impassible du cardiologue, encadré par deux constables dans le box des accusés. Certains détails ont suscité des murmures et des soupirs dans la salle, où se mêlaient badauds et proches des victimes.

Comme la veille, l'avocat de Turcotte, Me Pierre Poupart, a demandé que l'on retire les menottes à son client pour qu'il puisse prendre des notes. Il n'a pas semblé en prendre davantage que la veille.

Habillé d'une veste noire et d'un chandail gris, Guy Turcotte a suivi le témoignage du policier sans manifester d'émotion particulière.

Un ambulancier témoigne

Il a montré la même neutralité au cours du témoignage de l'un des ambulanciers appelés ce matin-là, Bertrand Rochon. Pour une raison inconnue, cette impassibilité s'est cependant effondrée plus tard en matinée, après la pause de 11h. Arrivé en retard de quelques minutes, Guy Turcotte semblait ébranlé. Il avait les traits tirés et gardait les yeux baissés. Il a gardé cette attitude tout le reste de la matinée.

L'ambulancier Rochon a transporté le cardiologue à l'Hôtel-Dieu de Saint-Jérôme, où travaillait également son ex-femme, Isabelle Gaston, comme urgentologue. Il a décrit son arrivée au domicile du cardiologue, la découverte des corps, la nature de son intervention et l'interaction qu'il a eue avec le père des enfants.

L'enquête préliminaire reprend ce matin, avec le témoignage d'autres secouristes intervenus ce jour-là. On s'attend à ce que la Couronne fasse entendre une dizaine de témoins d'ici à vendredi, dont la mère des victimes.