Un retraité qui a porté plainte à la police de Montréal pour une affaire de rage au volant n'aura jamais gain de cause. Son dossier n'a pas été traité à temps «par manque de ressources et d'effectifs», conclut le Commissaire à la déontologie policière.

Jean Dagenais, 63 ans, avait porté plainte au Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) le 26 juin 2008. Ce jour-là, un automobiliste l'avait coupé dans la voie de desserte de l'autoroute 15, à la hauteur de Saint-Laurent, pour le forcer à immobiliser son véhicule. Il était ensuite sorti de son véhicule et aurait frappé Jean Dagenais au bras.

 

«J'ai noté son numéro de plaque d'immatriculation et j'ai immédiatement appelé la police», raconte M. Dagenais, professeur de français à la retraite, qui réside à Saint-Laurent. Les policières qui ont reçu sa déposition lui auraient alors précisé que sa plainte ne serait pas traitée rapidement puisque plusieurs enquêteurs partaient en vacances d'été.

En septembre, un policier a pris contact avec Jean Dagenais pour lui dire que l'enquêteur affecté à son dossier communiquerait avec lui dans les trois semaines. Sans nouvelles, M. Dagenais a tenté de joindre l'enquêteur trois fois entre les mois de septembre et de novembre. Il dit avoir laissé chaque fois un message dans sa boîte vocale.

C'est finalement en janvier que le sexagénaire a eu des nouvelles du poste de police. Et elles étaient mauvaises. Un policier lui a annoncé que le délai de prescription de six mois pour traiter sa plainte était échu et que, par conséquent, elle serait abandonnée.

Manque d'effectifs

Furieux, Jean Dagenais s'est adressé au Commissaire à la déontologie policière en octobre dernier. Les plaintes contre les policiers qui ont traité son dossier n'ont pas été retenues.

«Le problème à l'origine de la plainte est à caractère systémique, en ce que c'est par manque de ressources et d'effectifs que la plainte (...) s'est retrouvée prescrite», peut-on lire dans la réponse du commissaire.

Guy Ouellet, commandant au SPVM, admet que Jean Dagenais «n'a pas eu justice». «Mais ce n'est pas une question de manque de personnel, mais une question de manque de vigilance», dit-il.

Selon lui, l'enquêteur au dossier avait été réaffecté temporairement à une autre unité et n'avait pas cru bon de transmettre ses dossiers. Puisque la plainte de M. Dagenais concernait une infraction sommaire, la Couronne avait un délai de six mois pour porter des accusations. Les autres dossiers de l'enquêteur étaient de nature criminelle et n'étaient soumis à aucun délai, a précisé le commandant Ouellet.

«Ce dossier-là nous a échappé, mais c'est une exception, assure-t-il. Au centre opérationnel nord, on reçoit plus de 36 000 plaintes par année et on les analyse toutes.»

Jean Dagenais garde pour sa part un goût amer de cette histoire. «Le conducteur aurait probablement écopé d'une simple amende, mais c'est une question de principe. Cet individu-là avait besoin d'une leçon.»