Un employé de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) sur cinq a été victime de harcèlement dans la dernière année et près de la moitié des travailleurs ont songé à changer d'emploi, révèle un sondage interne dont La Presse a obtenu les résultats.

«Un grand nombre d'employés ont dit avoir été harcelés par un supérieur, un collègue, un client ou un citoyen», peut-on lire dans le rapport, obtenu grâce à la Loi sur l'accès à l'information.

 

La GRC sonde ses employés tous les deux ans pour connaître leur degré de satisfaction au travail. Plus de 12 000 personnes ont participé à la dernière enquête.

Point positif: 92% des travailleurs sondés se sont dits fortement résolus à assurer le succès de la GRC. Et 87% se sont dits fiers de travailler pour le corps policier.

Mais d'autres données suggèrent que les conditions de travail restent difficiles au sein de la force policière fédérale. Près d'une personne sur cinq, 19%, dit avoir été harcelée ou tourmentée verbalement au cours des 12 derniers mois. Dans la majorité des cas, l'auteur de ces agressions était un superviseur direct, un supérieur ou un collègue.

Dans un courriel, la direction de la GRC a souligné qu'elle s'est dotée d'un programme pour favoriser le respect en milieu de travail, «axé principalement sur les politiques et les lignes directrices sur le harcèlement».

«Des consultations auprès des employés ainsi que des gestionnaires et des superviseurs ont présentement lieu afin d'obtenir leurs commentaires sur la politique actuelle», a écrit la porte-parole de la GRC, Julie Gagnon.

L'Association des membres de la police montée du Québec, un organisme qui milite pour la syndicalisation des agents de la GRC, n'est guère étonnée du résultat. Elle affirme que les femmes sont les principales victimes du harcèlement en milieu de travail.

Son président, le sergent d'état-major à la retraite Gaétan Delisle, souligne que la GRC reste un milieu où la vaste majorité des postes d'état-major sont occupés par des hommes.

«C'est une culture d'entreprise qui n'a jamais changé même si le gouvernement a tous les rapports en main pour dire qu'il faut changer, dénonce-t-il. Il aurait dû y avoir de l'action depuis 1974 dans ce domaine et il n'y en a pas.»

En juillet, Le Droit a dévoilé le contenu d'une note de service préparée pour le ministre de la Sécurité publique, Peter Van Loan, selon laquelle «la GRC se classe dans les 10 pires organismes gouvernementaux en matière de harcèlement». Le document révélait que le tiers du personnel avait déclaré avoir été victime de harcèlement au travail dans les deux années précédentes.

Le sondage révèle aussi que pour 42% des répondants, la GRC ne prépare pas adéquatement ses gestionnaires à exercer leurs responsabilités. Et 48% d'entre eux ont affirmé avoir pensé quitter l'organisation pour travailler ailleurs à une ou à plusieurs reprises au cours des six derniers mois.

La porte-parole de la section québécoise de la GRC, Caroline Letang, affirme que cette dernière donnée est moins dramatique qu'il n'y paraît.

«Ce n'est pas nécessairement parce qu'ils sont insatisfaits, explique-t-elle. On touche à différents métiers lorsqu'on est policier: on va voir ce que font les avocats, les ambulanciers, les pompiers. Parfois, ils vont dire que ce sont des métiers intéressants. Ça peut être positif.»

Avec la collaboration de William Leclerc