Et de deux: après Adil Charkaoui, une deuxième personne en quelques semaines voit son certificat de sécurité déclaré invalide par la Cour fédérale.

Dans une décision de 183 pages, le juge Richard Mosley a décrété lundi qu'il n'y avait plus de motif raisonnable pour maintenir un certificat à l'endroit d'Hassan Almrei.Ce faisant, le magistrat a sévèrement critiqué le Service canadien de renseignement de sécurité (SCRS) et les ministres responsables pour ne pas avoir considéré toute l'information disponible, au moment de renouveler la mesure, en février 2008. «Ils ont cru avoir fait leur travail en 2001 et qu'il n'y avait plus besoin de poursuivre leur enquête», a-t-il noté.

Hassan Almrei, l'un des quatre hommes musulmans à toujours faire l'objet d'un certificat de sécurité, est détenu depuis octobre 2001. Le SCRS lui reprochait entre autres de partager l'idéologie d'Oussama Ben Laden, d'avoir entretenu des liens avec des membres de réseaux «affiliés» à Al-Qaeda et d'avoir fabriqué de faux documents.

Or, si les craintes des services de renseignements canadiens pouvaient être justifiées dans la foulée des attentats du 11 septembre 2001, elles n'avaient plus leur place en 2008, lorsqu'ils ont émis un nouveau certificat à la suite d'un jugement de la Cour suprême, a tranché le juge Mosley.

«L'évaluation du SCRS en 2008 a été préparée, à mon avis, sans considération suffisante de toutes les informations en sa possession et sans considérer si l'état des connaissances à propos du risque de sécurité posé par des extrémistes islamistes à la sécurité nationale avait évolué depuis qu'Almrei est détenu», a-t-il écrit.

L'un des experts cités par le juge, le professeur Brian Williams de l'Université du Massachusetts, est allé plus loin, qualifiant une portion du travail du SCRS de «renseignement Wikipédia».

«C'est une critique très sévère du SCRS, a constaté l'avocat d'Hassan Almrei, Lorne Waldman. Les gens du SCRS devraient jeter un coup d'oeil attentif à ce jugement et peut-être renvoyer certains de leurs agents à l'école.»

Me Waldman a dit espérer que la Cour puisse ordonner la révocation du certificat d'ici quelques jours, et ainsi permettre à son client d'être enfin libre, après huit ans de détention.

Il faudra toutefois attendre la décision des avocats du fédéral: à la fin de son jugement, le juge Mosley a ouvert la porte à une forme d'appel par le gouvernement. Me Waldman a déclaré qu'il s'y opposerait.

«Notre objectif est de s'assurer que les Canadiens sont en sécurité face aux menaces terroristes «, a fait savoir le ministre de la Sécurité publique, Peter Van Loan, par la voix d'un porte-parole.

Le ministre Van Loan a par ailleurs annoncé dans une entrevue avec La Presse Canadienne qu'il travaillait actuellement sur une réforme du système des certificats de sécurité, qui existent depuis 1978. Depuis 1991, 28 ont été émis. Outre Hassan Almrei, Mohammed Mahjoub, Mahmoud Jaballah et Mohamed Harkat tombent sous le coup de cette mesure déclarée en partie inconstitutionnelle par la Cour suprême du Canada en février 2007.