Vu les progrès faits au centre jeunesse depuis son arrestation, la Couronne a changé d'avis sur la peine à imposer au jeune responsable de la mort de Kim Ngu Lieu, cette femme de 67 ans agressée à Montréal-Nord en mai dernier. D'abord tentée de recommander une peine pour adulte, la poursuite estime aujourd'hui que l'adolescent de 15 ans mérite une véritable chance, dans un centre jeunesse, de retourner dans le droit chemin.

L'adolescent a été décrit comme un jeune intelligent aux prises avec de multiples problèmes: famille dysfonctionnelle, consommation abusive de drogues, amis délinquants, agressivité, etc. Des problèmes qu'il serait prêt à régler.

 

Malheureusement, il aura fallu qu'il commette un geste aussi grave pour prendre conscience de ses problèmes et enfin accepter de l'aide, a témoigné une intervenante du centre jeunesse, France Folley, hier au moment des plaidoiries sur la peine devant le juge Louis Grégoire en chambre de la jeunesse de Montréal.

«Je me sens comme un monstre qui vient de détruire quelque chose qui appartient à quelqu'un d'autre. La famille doit m'en vouloir beaucoup. Je les comprends. Si ça avait été ma mère, je réagirais de la même façon», a confié l'adolescent à cette intervenante.

Deux autres jeunes hommes de 16 ans sont accusés dans cette affaire, mais l'instigateur du drame est l'adolescent de 15 ans. Il cherchait de l'argent pour rembourser des dettes de drogue. Après avoir bu de l'alcool toute la soirée, il a convaincu les deux autres d'aller faire un vol. C'est lui qui a choisi la victime vulnérable - Mme Lieu mesurait 4 pieds 11 pouces et pesait 115 livres - alors que celle-ci attendait l'autobus, seule dans Montréal-Nord. Et c'est également lui qui a poussé la victime lorsqu'elle a refusé de leur donner son sac à main.

Lorsque l'adolescent de 15 ans a fui les lieux du crime avec ses deux présumés complices, il ne se doutait même pas que la victime avait pu être blessée, a-t-il aussi expliqué à l'intervenante. Mme Lieu s'est heurté la tête en tombant sur le trottoir, puis est morte deux jours plus tard des suites de sa blessure à l'hôpital.

Assis dans le box des accusés, le frêle adolescent a fixé le sol durant une bonne partie de l'audience. Pour l'instant, il est le seul des trois accusés à avoir plaidé coupable à une accusation réduite d'homicide involontaire, de vol qualifié et de complot pour vol.

Témoignage d'un fils

L'un des quatre fils de la victime, Quoc Huy Truong, 34 ans, a essuyé quelques larmes en témoignant, hier, des conséquences que ce drame avait eues sur la vie de sa famille. «Peut-être que je suis plus chanceux que le petit jeune, a-t-il dit en se tournant vers lui. Ma mère nous a montré à être des bons citoyens.» Après le drame, M. Truong a pris des vacances en Chine pour chercher du réconfort auprès de sa famille restée là-bas. «En Chine, il aurait eu la peine de mort. Ici, c'est la réhabilitation. Pour ma famille là-bas, ce n'est pas juste», a-t-il ajouté à sa sortie de la salle d'audience aux médias présents.

La procureure de la Couronne, Karen Ohayon, s'est basée sur le rapport de l'intervenante du centre jeunesse pour recommander une peine de trois ans de garde fermée.