Le Service de police de la Ville de Montréal et la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse ont un profond désaccord sur la façon de traiter des plaintes de profilage racial.

La Ville de Montréal - employeur des policiers - vient de s'adresser à la Cour supérieure pour inciter la Commission «à revenir à des pratiques plus professionnelles» et «plus respectueuses des droits des personnes avec qui elle fait affaire» dans le cadre de ses enquêtes concernant des plaintes de profilage racial portées contre des policiers du SPVM.

 

De son côté, la Commission défend son professionnalisme en vantant ses délais d'enquête plus courts qu'auparavant. En six ans, la Commission a mené une centaine d'enquêtes de profilage racial déposées contre des policiers du SPVM.

Or, la Ville reproche à la Commission d'avoir adopté une nouvelle approche d'enquête depuis cet automne. Une approche qui ne respecte pas le droit au silence dont jouissent les policiers visés par une plainte déontologique, allègue la Ville dans sa requête en jugement déclaratoire déposée le 27 novembre.

Ceux qui se disent victimes de profilage racial portent souvent plainte devant deux instances: la Commission des droits de la personne et le Commissaire à la déontologie policière. Les policiers ont toujours invoqué leur droit au silence devant la Commission des droits tant que leur dossier en déontologie n'était pas fermé. «Cette façon de faire a toujours été acceptée et respectée par la Commission jusqu'à cet automne», soutient la Ville.

Une quinzaine de policiers du SPVM dont le dossier est toujours à l'étude en déontologie ont toutefois récemment reçu des citations à comparaître devant la Commission des droits de la personne. Avec sa requête, la Ville tente de faire annuler ces citations.

De son côté, la Commission des droits de la personne s'«étonne» qu'on lui reproche de «faire son travail» dans des délais d'enquête plus rapides qu'avant, notamment en n'attendant pas la décision du Commissaire en déontologie pour agir. «Notre travail est de faire enquête sur des plaintes qui nous sont adressées. Faire enquête implique différentes actions dont celle de contraindre des gens à témoigner devant nous», indique son vice-président, Marc-André Dowd.

Vrai que dans le passé, la Commission a eu tendance à accepter «automatiquement» les demandes de remise de cause des policiers, a indiqué M. Dowd.

Les auteurs des plaintes de profilage racial font «très souvent» l'objet d'accusations pénales ou criminelles dans le cadre des événements ayant mené au dépôt de leur plainte, allègue aussi la Ville. Les policiers ont toujours refusé de témoigner tant que le sort judiciaire de ces accusations n'était pas connu. La Ville soutient qu'un policier ne peut pas être blâmé si une infraction pénale ou criminelle a bel et bien été commise.

L'avocat de la Ville de Montréal, Pierre Yves Boisvert, n'a pas rappelé La Presse, hier. La requête devrait être entendue au début de 2010. Cette requête est déposée au moment où la Commission lance une consultation auprès des jeunes québécois sur le profilage racial.