Le sort de Normand Janelle, accusé d'un double meurtre prémédité survenu il y a 30 ans, repose sur la crédibilité que le jury accordera à la version de son ex-conjointe, Claudette Verret.

Les délibérations commenceront aujourd'hui, après que le juge Jean-Guy Boilard eut donné ses directives au jury à ce procès qui se déroule à la vitesse grand V depuis lundi au palais de justice de Longueuil.Au moment des plaidoiries, hier, la défense a dépeint le témoin principal de la poursuite, Claudette Verret, comme une «alcoolique dépressive» qui a donné une «version invraisemblable» de ce qui s'est déroulé dans la nuit du 18 au 19 août 1979. Nuit durant laquelle sa soeur, Diane Verret, et son beau-frère, William Thériault, ont été tués par balle. Les corps ont été retrouvés six jours plus tard.

Mme Verret a décidé de témoigner contre son ex-conjoint plus tôt cette semaine, après avoir elle-même été reconnue coupable du double meurtre prémédité au terme de son procès. Elle n'avait pas témoigné à son propre procès.

La femme de 61 ans n'a pas vu l'arme du crime ni été témoin du double meurtre, a souligné l'avocate de la défense, Me Josée Veilleux. «Mme Verret a une mémoire floue et une propension forte à interpréter les événements», a ajouté l'avocate de Normand Janelle. L'arme du crime n'a jamais été retrouvée. Aucune empreinte de l'accusé n'a été relevée sur la scène du double meurtre.

«Se réconcilier»

Chose certaine: Normand Janelle et Claudette Verret ont rendu visite aux victimes cette nuit-là. Selon la défense, leur objectif était de «se réconcilier», alors que les deux couples ne s'étaient pas parlé depuis quatre mois. Et si Claudette Verret a fourni 200$ à son conjoint pour aller acheter une arme la nuit du double meurtre, c'était pour se «protéger» contre son beau-frère «dangereux», qui en possédait au moins une à la maison.

Selon la thèse de la Couronne, Normand Janelle aurait tué les deux victimes par balle, mais c'est Claudette Verret qui a commandé les meurtres. Le mobile de Janelle n'est pas clair aux yeux de la poursuite. Cela peut être par amour pour sa conjointe ou en raison de sa haine envers William Thériault, ou encore pour toucher l'argent d'une assurance vie de 30 000$ de Diane Verret, dont Claudette était bénéficiaire. Ou pour toutes ces raisons.

La Couronne a insisté sur le fait que Claudette Verret n'a pas reçu d'avantages en échange de son témoignage. «Cette nuit-là, l'accusé lui a demandé ce qu'il devait faire avec sa soeur. Elle a répondu: fais ce que tu veux. Est-ce qu'on peut penser sérieusement que c'était une rencontre dans le but d'une réconciliation?» a dit le procureur de la Couronne, Sacha Blais.

Dans la noirceur

À l'époque du double meurtre, la police de Longueuil n'a jamais eu de soupçons envers la famille de Diane Verret. Les enquêteurs avaient dans leur ligne de mire plusieurs fréquentations criminelles de William Thériault et même un policier de la Sûreté du Québec connu pour ses relations douteuses avec le monde interlope. Ce dernier avait déjà été le colocataire de la victime.

C'est ce que le policier de Longueuil chargé de l'enquête en 1979, Jacques Bédard, a expliqué aux jurés, hier, plus tôt dans la journée. Fait rare: l'enquêteur à la retraite a témoigné à la demande de la défense. «On nageait un peu dans la noirceur au chapitre du mobile. Mon hypothèse était que Thériault était victime d'un règlement de comptes à cause de ses fréquentations», a dit le témoin. Mais après des mois d'enquête, le policier ne détenait toujours pas de suspect sérieux. Claudette Verret et Normand Janelle ont été arrêtés 29 ans plus tard, dénoncés par la colocataire de Claudette Verret, à qui cette dernière venait de se confier.