En roulant sur le pont Le Gardeur à tombeau ouvert, à contresens et au beau milieu de la nuit, André Bélec a tué deux jeunes hommes et en a handicapé un troisième, en mai 2005. Jeudi matin, il a écopé de quatre ans et demi de prison pour ses gestes.

Au terme de son procès pour cette affaire, en février dernier, l'homme de 37 ans avait été déclaré coupable de conduite dangereuse. Les trois victimes, toutes dans la jeune vingtaine, circulaient normalement dans une Honda Civic en direction de Montréal, vers 3h15, le 15 mai 2005. La Sunfire conduite par Bélec a surgi devant eux à contresens et a heurté la Honda de plein fouet. Personne n'a freiné, l'impact a été fulgurant. Bélec, qui se trouvait seul dans sa voiture, a été blessé aussi, mais c'est lui qui s'en est le mieux tiré.Au cours du procès, certains éléments de preuve, notamment la frustration qu'il éprouvait envers une ex-copine cette nuit-là, tendaient à démontrer qu'il avait voulu se suicider en agissant ainsi. Hier, le juge Claude Leblond a fait valoir que les mobiles de tentative de suicide, de colère aveugle et de consommation de drogue évoqués par la procureure de la Couronne Sylvie Dulude étaient plausibles, mais qu'ils n'avaient pas été établis hors de tout doute raisonnable. Le magistrat ne les a donc pas considérés comme facteurs aggravants dans l'évaluation de la peine. Il a toutefois considéré le fait que Bélec avait un antécédent de conduite avec facultés affaiblies, en 1994, et qu'il avait conduit pendant un mois après le terrible accident de 2005, alors qu'il avait... les deux jambes dans le plâtre! Le juge a d'ailleurs relevé l'immaturité, l'irresponsabilité et la témérité de Bélec.

Martin Lapointe, seul survivant des trois passagers de la petite Honda Civic, avait 24 ans au moment de la tragédie. En plus d'avoir perdu ses deux copains, David Lapointe, 22 ans, et David Saint-Germain, 23 ans, il garde de cet accident de lourdes séquelles qui ont complètement changé sa vie. Ayant subi de nombreuses fractures, notamment au bassin, aux jambes et à la tête, il a passé plus de deux ans à l'hôpital et doit encore subir d'autres interventions chirurgicales. Il se déplace avec des béquilles, et son médecin lui a dit qu'il ne pourrait jamais travailler, ce qui l'a complètement anéanti.

Le jeune homme semblait plutôt satisfait de la peine, en sortant de la salle d'audience. Pour lui, cela venait boucler la boucle, et il espérait pouvoir enfin passer à autre chose pour «avancer.»

Soulignons enfin que Bélec ne pourra conduire pour une période de cinq ans après sa sortie de prison. Hier matin, il a aussi plaidé coupable à une accusation de possession de marijuana (qu'il avait dans la voiture la nuit de l'accident), ce qui lui a valu cinq jours de prison. Comme il a déjà interjeté appel du verdict dans sa cause de conduite dangereuse, il est probable qu'il fera de même pour la peine qu'il vient de recevoir.