Tristesse. Incompréhension. Le 11e homicide répertorié cette année à Montréal n'a pas laissé indifférents les résidants du quartier Saint-Michel. Hier, un père de famille de 40 ans a été formellement accusé du meurtre prémédité de son fils de 11 mois.

D'abord considéré comme un témoin important du drame, Mohamed Lamine Keita est maintenant soupçonné par les policiers d'avoir provoqué la mort de son enfant, découvert en profonde détresse respiratoire dans son logement de la rue Fleury, vendredi après-midi. Les ambulanciers dépêchés sur place avaient alors tenté de le réanimer, en vain. Son décès a été confirmé dès son arrivée à l'hôpital.

Sans antécédent judiciaire, Mohamed Lamine Keita était dépeint hier comme un homme agréable et avenant. «Il était toujours très poli et agréable», a raconté hier Pierrette Laflèche en montrant du doigt la porte de l'appartement de son voisin immédiat. Aucun indice ne lui avait permis de prévoir le drame. Les policiers sont bien venus cogner à la porte de M. Keita et de sa conjointe, il y a un an, mais c'était à la demande d'un ami, inquiet d'être sans nouvelles d'eux. Depuis, plus rien. Pas de coups de gueule, pas de signes apparents de conflits dans le couple. «Les samedis et dimanches, ils organisaient souvent des fêtes de famille qui avaient l'air très joyeuses», a dit Mme Laflèche.

Dans l'entrée de l'immeuble, une poussette verte témoigne des sorties fréquentes que le père faisait avec son tout-petit à l'épicerie située juste en face. «Il était très gentil et semblait être un père attentionné», a remarqué Mohamed Mansour avant de préciser: «J'espérais sincèrement que ce soit un accident.»

L'imposant dispositif policier déployé vendredi soir avait disparu, hier, mais la scène continuait d'attirer quelques curieux, et le drame émaillait les conversations des passants. «Ça me fait beaucoup de peine pour l'enfant, mais ça ne m'étonne pas tant que ça, a relevé Carmella Larocci, qui ne connaît pas l'accusé. De nos jours, c'est très difficile pour les parents de trouver de l'aide quand ils sont en détresse.»

Sur le pas du 3279, rue Fleury, quelqu'un avait d'ailleurs déposé un petit message d'appui visiblement adressé à l'accusé, écrit soigneusement sur un carton jaune. «Bon courage, vous n'êtes pas seul.» Un lampion, un ourson en peluche bleue et une rose jaune avaient aussi été déposés près de la lettre.

Détenu par les policiers depuis vendredi, Mohamed Lamine Keita a comparu par vidéoconférence, hier. Il reviendra devant la Cour le 15 juin pour l'enquête sur sa remise en liberté.