Nadège Merceus admet avoir transporté les sacs contenant les parties du corps de Shane Jimrattie jusque dans la baignoire, le matin du 16 avril 2007, et avoir ensuite fait le ménage dans l'appartement. Mais son implication dans cet horrible crime s'arrête là. C'est Michel Côté qui a tué et démembré la victime.

C'est la version que Nadège Merceus a livrée, hier, au jury chargé de les juger, Michel Côté et elle. Ils sont accusés du meurtre non prémédité de Shane Jimrattie, et d'outrage à son cadavre. Mme Merceus, 31 ans, connaissait la victime, un livreur de drogue de 21 ans, pour l'avoir rencontré plusieurs fois chez sa mère (à elle, consommatrice elle aussi).

 

Selon ses explications, après avoir englouti une quantité phénoménale de crack avec Michel Côté, dans leur petit appartement du boulevard Rosemont, étant alors en manque, Mme Merceus décide d'appeler Jimrattie vers 2h dans la nuit du 16 avril, pour avoir de la drogue. Celui-ci arrive vers 3h30. Mme Merceus lui remet 125$, et Jimrattie lui donne de la cocaïne.

Elle va alors s'enfermer dans la salle de bains, pour transformer la cocaïne en crack, avec une cuillère, de l'eau, de la «petite vache» (bicarbonate de soude) et un briquet. Pendant qu'elle s'affaire, et «fume une puf», elle entend les deux hommes se parler. «Ça a l'air sérieux, pas amical.» Puis elle entend un gros boum. Elle va voir. «Je vois Michel en train de frapper Shane à la tête avec un marteau. Shane ne peut pas respirer. Il y a beaucoup de coups», a raconté Mme Merceus, hier, en pleurant et en s'essuyant les yeux avec un mouchoir.

Coupé au couteau à gypse

Selon son récit, «choquée et surprise» par ce tableau, elle retourne s'enfermer dans les toilettes. Elle ressort au bout d'un moment. Invitée par son avocat, Me Stephen Angers, à décrire le faciès de Côté à ce moment, Mme Merceus a répondu qu'il était «rouge et enragé». Quand il a eu fini de frapper, Côté s'est écrié: «Qu'est-ce que j'ai fait! Qu'est-ce qu'on va faire avec ça?»

Peu de temps après, Côté, un ancien boucher reconverti en menuisier, s'est emparé d'un couteau à gypse, et a commencé à couper le corps, dans le salon, selon Mme Merceus.

Pourquoi n'a-t-elle pas appelé le 9-1-1? «J'étais effrayée, gelée, j'étais dans un état que je ne savais pas quoi faire», a-t-elle expliqué, hier.

Après le démembrement, Mme Merceus ne sait plus si c'est Côté ou elle qui est allé chercher des sacs-poubelles dans le garage de leur immeuble, pour disposer du cadavre. Une fois que ça a été fait, à la demande de Côté, elle l'a aidé à transporter les sacs dans la baignoire, puis a fait le ménage. Elle a encore consommé du crack, que Côté lui a fourni. Selon Mme Merceus, Côté était fâché contre elle, et considérait que ce qui était arrivé était de sa faute, car c'est avec elle qu'il avait commencé à consommer du crack.

Michel Côté, qui a passé sa vie à Notre-Dame-de-la-Paix, un petit village de l'Outaouais, n'était arrivé à Montréal que depuis six mois, lors des événements. Il y est venu vers la fin du mois d'août 2006 pour travailler à réparer les immeubles de son beau-frère. Il a rencontré Nadège Merceus, locataire, au cours du mois d'octobre, et est tombé amoureux d'elle. Il a laissé sa conjointe des 27 dernières années, pour se mettre en ménage avec Mme Merceus. Celle-ci affirme lui avoir dit dès le départ qu'elle avait «un défaut», c'est-à-dire qu'elle prenait du crack. Côté lui a demandé ce que c'était et a insisté pour essayer ça lui aussi. Mme Merceus soutient l'avoir mis en garde. «Je lui ai dit: il y en a qui ont perdu leur loyer, et leur vie avec ça.»

Mais Côté y a goûté, et est vite devenu accro. Il prenait aussi des médicaments. Un jour, en novembre 2006, elle a appelé l'ambulance, car Côté était seul devant le placard, clouait sans marteau et parlait à un collègue imaginaire.

Durant tout le temps qu'elle a été avec Côté, c'est lui qui payait pour tout, même la drogue.

L'interrogatoire de Mme Merceus se poursuit ce matin, au palais de justice de Montréal. Rappelons que le corps démembré de M. Jimrattie a été retrouvé le soir du 17 avril 2007, dans des sacs-poubelles, dans la Ford Explorer de Côté.